Guy Delisle est un mauvais père ! Ce n'est pas moi qui le dis, c'est lui !!! Et il nous le prouve dans sa dernière bande dessinée (Delcourt) où il décrit avec complaisance les mille et une façons de faire souffrir ses enfants. Pourtant, si l'on s'en tient à ses albums passés, il semble être plein d'amour pour eux...
La Chronique BD de BDfugue.com
Voyez Louis au ski ou Louis à la plage (Delcourt) : un regard attendri sur ce minuscule bonhomme perdu - mais pas désemparé - au milieu d'une foule d'adultes. Et dans Chroniques birmanes ou Chroniques de Jérusalem '(Delcourt), il joue le rôle de papa poule d'une façon impeccable. Pendant que sa concubine, administratrice au sein de MSF, travaille sur des missions de longue durée dans des pays à la situation politique pour le moins... complexe, il mène le petit Louis au parc (pas toujours simple à trouver, le parc) Lui trouve une nounou fiable (mais souvent bizarre) Et lui fait tester la cuisine locale (régulièrement surprenante)…
En vérité, ses albums publiés ne sont que la partie émergée de l'iceberg, la mise en forme soignée résultant du choix entre d'innombrables dessins au service d'un projet précis. Guy Delisle, comme beaucoup de ses confrères tient un blog où il parle de choses plus ou moins légères, du quotidien, et fort logiquement dans son cas, de ses "aventures" paternelles au jour le jour.
Grâce aux témoignages laissés sur ledit blog, il constate que beaucoup d'autres papas ont la même expérience de situations réjouissantes ou embarrassantes. De quoi en faire un livre, mais qui ne soit pas une simple compilation d'anecdotes attendrissantes... et un peu mièvres ! La collection "Shampoing" des éditions Delcourt se prête à cela : dirigée par Lewis Trondheim, c'est un fourre-tout très libre de ton.
Les premières pages du livre de Guy Delisle sont une compilation de charmantes anecdotes 100 % vraies. Entre la petite souris qui oublie deux jours de suite de remplacer par une pièce de monnaie la dent tombée, et la tentation de buller en terrasse plutôt que d'assister au cours de natation d'Alice, le "mauvais" père ne peut être accusé que d'étourderie ou d'une mauvaise foi sans conséquences traumatisantes.
Retrouver Le guide du mauvais père
de Guy Delisle
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Puis le ton change insidieusement, l'humour devient grinçant et une certaine méchanceté apparaît, fort perturbante s'agissant de très jeunes enfants !!!
On ne sait plus trop si la scène décrite est réelle ou juste exagérée... et c'est bien ce qui est intéressant en l'occurrence. Il n'y a pas de violence physique, juste un père légèrement neuneu qui abuse de son autorité sur ses gamins innocents et un peu désemparés.
C'est très drôle et ça peut même frôler l'absurdité totale : je pense à la séquence où la petite Alice (6 ans seulement) montre un joli dessin à son gentil papa. Après les compliments d'usage, les reproches arrivent sans crier gare.
Papier de mauvaise qualité, non-respect des règles élémentaires de la perspective, graphisme je-m'en-foutiste : "N'est pas Nicolas de Crécy qui veut !" (sic) Comme si Guy Delisle auteur confirmé recevait un futur confrère, avide de conseils... et prêt à s'en prendre plein la tête !
Mon sketch préféré ? Celui de la tronçonneuse, où l'on atteint des sommets dans le bon (?!?) goût. Je confesse un amour immodéré pour notre ami Delisle, et je suis ravi de le voir rejoindre d'une certaine façon le mauvais esprit du génial Philippe Geluck, toujours politiquement très incorrect...
{CARROUSEL}