vient d'approuver un texte relatif à la mise à disposition des oeuvres orphelines, ces textes, enregistrements ou films dont le titulaire des droits est inconnu ou introuvable. Ces oeuvres seront numérisées, puis mises à disposition du public pour une utilisation non lucrative, dans tous les États membres de l'UE.
Cristiano Corsini CC BY-NC-SA 2.0
Le texte a été présenté ce matin même par Lidia Joanna Geringer de Oedenberg, devenue une habituée de la question de l'accès aux oeuvres orphelines. Précisons d'emblée que l'amendement 62 au rapport sur les utilisations autorisées des oeuvres orphelines ne concerne strictement que ces dernières, et en aucun cas les oeuvres indisponibles : « La présente directive est sans préjudice de solutions spécifiques développées dans les États membres pour traiter de questions de numérisation de masse, comme dans le cas d'oeuvres dites indisponibles dans le commerce. »
Première observation : le statut « oeuvre orpheline » ne recouvre toujours pas la même réalité selon les pays de l'Union. Une harmonisation sera donc nécessaire, pour éviter que bibliothèques, écoles et autres établissements publics ne se retrouvent avec une procédure judiciaire malvenue en ces temps de disette. Par ailleurs, l'État membre où l'oeuvre a été publiée pour la première fois se chargera des recherches, dont il devra subsister des traces dans une « base de données », vraisemblablement via l'Office de l'Harmonisation dans le Marché intérieur (OHMI), accessible au grand public.
Il convient que cette recherche diligente fasse l'objet d'une approche harmonisée afin d'assurer un niveau élevé de protection du droit d'auteur et des droits voisins dans l'Union. Elle devrait comporter une consultation des sources qui fournissent des informations sur les oeuvres et autres objets protégés, sources déterminées, conformément à la présente directive, par l'État membre dans lequel la recherche diligente doit être effectuée. Pour ce faire, les États membres pourraient se référer aux lignes directrices pour la recherche diligente convenues dans le cadre du groupe de travail de haut niveau sur les bibliothèques numériques établi dans le contexte de l'initiative bibliothèques numériques i2010. (voir le rapport et son appendice, en anglais)
Bien entendu, un potentiel ayant droit pourra toujours choisir l'opt-out s'il veut conserver tous les droits d'exploitation sur son oeuvre. Fabienne Gutmann-Vormus, qui a signé le communiqué publié sur le site du Parlement, nous signale que « c'est à lui de se manifester » et donc de rester vigilant sur le devenir de son oeuvre. Un procédé qui avait été largement reproché à Google Books, justement, et qui, par nature serait, d'une part anticonstitutionnel, et d'autre part, contraire à la Convention de Berne, rien que ça. (voir notre actualitté)
L'auteur de l'oeuvre pourra d'ailleurs réclamer une indemnisation : cependant, celle-ci sera d'emblée limitée, afin que les institutions publiques n'aient pas trop à souffrir d'une recherche infructueuse. En effet, les institutions publiques pourront « tirer des revenus de l'utilisation d'une œuvre orpheline (par exemple, les biens vendus dans le magasin d'un musée) » : les bénéfices dégagés, indique le rapport, seront investis dans la recherche et la numérisation.
Mais c'est également le retour des fameux partenariats public-privé, où la deuxième composante recevra les bénéfices des oeuvres orphelines :
Les accords contractuels étant susceptibles de jouer un rôle dans la promotion de la numérisation du patrimoine culturel européen, les bibliothèques, les établissements d'enseignement et les musées accessibles au public, ainsi que les archives, les institutions dépositaires du patrimoine cinématographique ou sonore et les organismes de radiodiffusion de service public devraient être autorisés à conclure avec des partenaires commerciaux, en vue d'entreprendre les utilisations autorisées par la présente directive, des accords pour la numérisation et la mise à disposition du public d'oeuvres orphelines. Ces accords devraient pouvoir inclure une contribution financière de ces partenaires. Ces accords ne sauraient imposer de restrictions aux bénéficiaires de la présente directive en ce qui concerne l'utilisation qu'ils font des oeuvres orphelines ni octroyer au partenaire commercial des droits pour utiliser ou contrôler l'utilisation des oeuvres orphelines.
Cependant, le rapport précise bien, une nouvelle fois, que ces oeuvres seront accessibles dans tous les États-membres, et pas seulement depuis une terrasse de bibliothèque, par exemple...
Amendement 62 Accord Orphelines Europ