Crédits: site officiel de Bernard Werber
Voilà enfin le dernier volet de la trilogie sur les dieux de B. Werber. Nous retrouvons donc Michaël Pinson pour la suite et fin de ses aventures. Et il faut bien l’avouer, on se demande après la rencontre avec un Zeus blasé, ce que Werber va bien pouvoir nous inventer encore. Qui peut bien être au dessus du dieu des dieux ? Et quelle va être l’ultime révélation ? Pour l’heure, nous retrouvons donc Michaël qui revient de la montagne de Zeus avec une nouvelle intrigante. Il existe une autre montagne derrière celle du dieu à l’éclair. Une montagne encore plus haute à laquelle aura accès le seul vainqueur du jeu d’Y. Après un court repos bien mérité, notre héros devra se préparer à vivre une finale longue et harassante, dont il ne ressortira pas indemne.
Après quelques péripéties, nous ferons la connaissance de nouveaux personnages dont la dauphinienne Delphine et l’auteur Gabriel Askolein. Ils vont nous faire découvrir la réalité quotidienne de terre 18. Une planète dont l’Histoire est proche de celle de notre bonne vieille Terre…
Que ceux qui n’ont lu aucun des autres volets de la saga des anges et de celle des dieux se rassurent car selon Werber, ce livre peut se lire indépendamment des quatre autres car il s’agit d’un « livre univers ». Indépendant des autres, certes mais dont il reprend tout de même les passages important, histoire de bien resituer le lecteur.
On pourra reprocher à B. Werber d’utiliser de grosses ficelles. Des chapitres courts, favorisant la lecture par épisode, un suspens qui est amené systématiquement en fin de ceux-ci. On pourra lui reprocher de ne pas faire de la grande littérature avec de grands mots et de grandes tournures. On pourra lui reprocher aussi de faire du commercial avec plein de clins d’œil à ses autres œuvres, ainsi qu’à son site internet « l’arbre des possibles ». Et de faire le lancement, par le biais de ce livre, de son jeu nous les dieux. Il n’empêche, on se laisse bercer par ses histoires. Et d’ailleurs, Werber, au travers de son personnage Gabriel Askolein règle ses comptes avec ces critiques. S’il n’est pas reconnu comme un grand écrivain mais plutôt comme un écrivain commercial, au moins lui, il amène des gens vers la lecture. D’ailleurs, tout ce passage avec Gabriel est assez intéressant et nous permet d’entrevoir le processus créatif de Werber. Sans dire que c’est totalement autobiographique, ce qui serai à coup sûr une erreur, on peut penser que l’auteur nous livre quand même quelques confidences comme l’importance pour lui de la mise en abîme.
Tout du moins nous pouvons la constater dans ce livre. Tout ou presque y est mis en abîme, l’auteur, le personnage principal, la couverture du livre et même le lecteur… Comme si ce livre était un grand jeu de miroir. Bien sûr on retrouvera les thèmes chers à Werber comme la recherche d’une spiritualité qui en élevant l’individu participe à élever l’humanité. Quelles sont les forces qui nous entravent ou qui nous poussent. La recherche insatiable de ce qu’il peut bien y avoir au dessus et cette question existentielle : y a-t-il une vérité ultime ? Est-elle satisfaisante ?
Les personnages évoluent et sont parfois en conflit avec le lecteur, on en arrive même à douter d’eux. Chez Werber vous ne trouverez pas de héros parfaits, son personnage principal Michaël est même l’archétype de l’antihéros. Parfois abattu, souvent dépassé, peu confiant en ses capacités, on finit par se demander comment il a pu en arriver là où il est. On a l’impression que tout lui tombe sur le coin du nez par hasard et qu’il essai gauchement de s’en dépatouiller comme un albatros sur le pont d’un navire. Il possède une grande qualité cependant qui le sauve, sa curiosité. Une curiosité saine qui le pousse à avancer toujours plus loin. Il est en outre capable de se remettre en question, ce qu’il fait un peu trop souvent d’ailleurs et qui lui vaudra de s’égarer parfois. Heureusement il a des amis, des personnages secondaires récurent, qui le remettent dans le droit chemin utilisant « l’amour pour épée, l’humour pour bouclier ». Un des nombreux leitmotivs qui parcourent les livres de Werber (celui-ci est tiré de L’empire des anges).
En effet, la construction d’une histoire, pour l’auteur, est comme une recette ou comme un corps humain. Ainsi l’auteur avoue qu’il existe un schéma commun à toutes ses histoires. Ce qui peut nous amener à craindre une certaine lassitude du lecteur au bout du compte, face à une écriture quelques peu « mécanique ». L’auteur répond encore une fois dans ce livre « Tout est dans le tour de main […] Il y a un cœur, un cerveau, un sexe, chez tous les individus, mais aucun n’est identique. ». Pour l’heure le pari est réussi, l’histoire nous a réservé encore quelques surprises assez savoureuses et la révélation finale plutôt surprenante donne une belle cohérence à l’ensemble. Espérons que Werber tienne ses promesses dans son prochain roman.
Enfin, nous retrouvons des passages de « L’encyclopédie du savoir relatif et absolu », toujours aussi édifiants. On y découvre encore pèle mêle, des recettes, des observations sociologiques, ou des comptes rendus d’expériences, qui, même s’ils marquent une pose dans le récit, servent toujours l’histoire d’une manière ou d’une autre.
Bref, nous avons aimé ce livre qui, en plus de nous fournir une conclusion surprenante aux péripéties de ce cher Michaël Pinson, nous a permis de connaitre un peu mieux son auteur, qui semble vouloir avec la fin de ce cycle, nous livrer sa vision de la création littéraire en même temps qu’un véritable plaidoyer en faveur de ses œuvres. Après tout « ce n’est pas parce qu’ils sont nombreux à avoir tord qu’ils ont raison. » En synthétisant toutes ses œuvres passées dans celle-ci et en menant au terme sa réflexion sur la spiritualité, il donne de la cohérence et de l’ampleur au tout. La conclusion d’une belle saga, distrayante, pas bête du tout et qui portera surement le lecteur à la réflexion.