C'est le 3 juin que doit sortir le livre publié chez Dialogues, la maison d'édition de Charles Kermarec, le fameux libraire breton, Mediator 150 mg, Combien de morts?. Une version numérique, un tirage à 5500 exemplaires, bref, un lancement assez classique en somme, si ce n'est que le sujet dérange. Et pas n'importe qui.
Avec ce titre, qualifié de « contre-vérité », par l'avocate du laboratoire pharmaceutique Servier, la société s'estime lourdement impactée. Et a formulé une demande en référé pour que l'ouvrage ne sorte pas.
Résultat d'une étude menée par le docteur Irène Frachon, pneumologue, du CHRU de Brest, il porte sur un coupe-faim pour diabétiques que le laboratoire a commercialisé, et dont la vente a été suspendue fin 2009, le 30 novembre par l’Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (Afssaps), suite, justement à cette étude.
« Au détour de cette enquête, on découvre les façons de travailler du laboratoire Servier, ainsi que les errements et les retards dans la décision de (...) l’Afssaps », précise France 3. En effet, l'étude montre que des personnes souffrant d'hypertension artérielle pulmonaire, consommaient du Mediator pour maigrir. Et au moment de son retrait, elles étaient près de 200.000 à en prendre.
Mais l'avocate, Me Nathalie Carrère, ne l'entend pas ainsi : « Cette couverture est non fondée et inutilement alarmante », d'autant qu'elle présente « une information inexacte, erronée et dénigrante ». Et de réclamer à la cour que la couverture du livre soit changée, ou que l'on y place un bandeau expliquant qu'elle porte atteinte au laboratoire. « Elle jette le discrédit sur le laboratoire. Peut affoler les populations. Et n’est fondée sur aucune preuve scientifique. »
Des exigences « proprement ahurissantes », rétorque l'avocat de l'éditeur, Me François Honnorat. « S'il y a risque avéré, la question posée est parfaitement légitime », ajoute-t-il, en rappelant la décision de l’Afssaps. L''éditeur, pour sa part, évoque une « atteinte à la liberté d’expression », et bien que le délibéré soit rendu le 7 juin, la décision actuelle du juge n'empêche en rien que le livre sorte selon le calendrier prévu.
En parallèle, un autre ouvrage, Avec le temps, publié en mars dans la collection Ouvertures, et écrit par Michel Treguer, a également été attaqué, toujours en référé. C'est le frère de l'auteur qui a cette fois mis en cause l'ouvrage, estimant qu'il met à nu la vie de sa famille. Ayant demandé le retrait du livre à l'éditeur, qui n'en a rien fait, il a alors saisi le tribunal.
« Je suis éditeur, pas plaideur ! On se passerait bien de ces procès, notamment celui d'aujourd'hui [NdR : propos tenus hier en fait]. On savait que l'enquête d'Irène Frachon allait provoquer des réactions. L'avocat, Me Honnorat, l'a lu ligne par ligne. Il est venu de Paris pour le défendre. Cela coûte de l'argent », explique Kermarec à Ouest France.