Killyŏ est une jeune veuve qui vit seule depuis plus de neuf années avec sa belle-mère, Madame Pak, dans une petite maison d'un petit village coréen.
Chŏmgae est une sorte de métayer pour ces deux femmes que la disparition des hommes de la famille a progressivement conduit vers le seuil de la pauvreté sinon de l'indigence. Chŏmgae vit à proximité avec sa famille.
Et puis il y a Pyŏngjo, un serviteur de passage qui vit dans l'étable.
Pyŏngjo qui, une nuit, alors qu'elle allait chercher du bois pour le feu, a violé Killyŏ. Laquelle, après toutes des années d'abstinence, s'est avérée immédiatement fertile.
Incapable de se débarrasser de cette vie qui grandit en elle et qui jetterait sur elle la honte et l'opprobre, Killyŏ cache à tous sa grossesse en enserrant son corps de tissus qui masquent son état.
Jusqu'à cette nuit où, dans la noirceur, elle se rend à proximité de l'abattoir pour y accoucher et y abandonner son enfant. Mais, prise de remords, elle y retournera le soir suivant pour découvrir que celui-ci a disparu et qu'il n'en subsiste plus aucune trace.
Abandonnées par Chŏmgae qui s'éloigne avec sa famille, par Pyŏngjo qui les extorque de quelques économies avant de fuir, les deux femmes se retrouvent encore plus seules jusqu'à la mort de Madame Pak.
Alors, vendant tous les biens de sa belle famille, Killyŏ s'en va sur les chemins de cette à la recherche de cet enfant qu'elle a abandonné mais dont elle sent avec certitude qu'il est vivant et qu'il a été recueilli par quelqu'un.
Je suis très perplexe après la lecture de ce livre.
Certes il est une fresque certainement pertinente d'une période particulièrement agité de cette Corée qui se bat contre elle-même : gauche ou droite, les exactions ne sont pas plus dignes parce qu'elles sont le fait de l'un ou de l'autre bord. Comme toujours, ce sont les pauvres gens qui subissent et sont maltraités par des systèmes aussi opaques que partiaux et à la justice expéditive.
Mais c'est vrai aussi que, à l'exception de cette sorte de chemin de croix que Kim CHUYŎNG impose à son héroïne (pour la punir de s'être fait violer ? parce qu'elle n'est qu'une faible femme dans un milieu si fortement hiérarchisé, si imprégné de sexisme et d'asservissement et de hiérarchie sociale ? parce qu'elle est toujours le jouet de quelqu'un moins faible qu'elle ?) dans ce contexte politique agité qu'il n'est pas si habituel de découvrir dans un livre, je n'ai pas trouvé le plaisir de lecture que j'avais pu imaginer.
J'ai été gêné par ce ton un peu condescendant vis-à-vis de ces populations paysannes malmenées, par cette rhétorique agreste qui ne sonne pas complètement juste même quand elle met en scène des expressions « typiques » (« craindre plus le travail qu'un tigre », « un plein désordre comme un poulailler après la visite d'un renard », …), par cette construction qui ne sait qu'envoyer Killyŏ dans les situations les plus inextricables sinon désespérées et toujours aux antipodes de son besoin de quiétude, par ce scénario qui se donne des airs de conte ancien sans en avoir la poésie (rien à voir avec le lumineux « Chant de la fidèle Chunhyang »).
Non, à l'exception de ce dépaysement intégral dans une culture extrême orientale que je en connais pas, je n'ai pas été conquis.