Si les noms de Georges Perec, Raymond Queneau, Jacques Roubaud ou encore Jacques Jouet vous sont familiers, il n’y a pas à hésiter une seconde. Le spectacle proposé par Michel Abécassis réunit une vingtaine de leurs textes qui sont propulsés merveilleusement sur le devant de la scène par trois acteurs virtuose.
Un courant
Georges Pérec disait en forme de boutade, « Au fond, je me donne des règles pour être totalement libre ». Cette idée est véritablement le fondement du « laboratoire d’écriture » créé en 1960 par le mathématicien François Le Lionnais et l’écrivain Raymond Queneau, entre autres.
Cette pièce vient montrer encore une fois toute l’actualité de ce mouvement qui vit toujours, notamment au travers de son site internet qui propose constamment de nouvelles perspectives d’écritures contraintes.
L’Oulipo, Ouvroir de littérature potientiel a pour règle l’écriture contrainte. La Disparition de Georges Pérec (publié en 1969), illustra de façon célèbre le procédé avec l’évincement de la lettre "e " de l’ensemble de l’œuvre.
Michel Abécassis reste en admiration devant ce travail, lui qui avait déjà mis en scène du Pérec en 2001 avec L’Augmentation : « les textes oulipiens sont d’une richesse phénoménale. Leurs auteurs sont des savants qui nous ouvrent des fenêtres sur des territoires inattendus, farfelus, singuliers, barges et où l’humour le dispute à la fantaisie ».
La pièce
Il ne faut pas s’attendre à trouver du théâtre classique en venant voir Oulipo, Pièces détachées. Ce n’est pas le récit d’une histoire, mais « une mise en abyme des mots » selon son metteur en scène. Le spectateur se trouve pris dans une tempête de mots, contrepèteries, poèmes hallucinés et récits à double sens.
Toutefois, Michel Abécassis rappelle que « les oulipiens n’ont jamais eu le souci de la scène, de la mise en voix ». C’est pourquoi il dit avoir passé « un an complet en immersion en Oulipo pour lire les milliers de textes produits » : « On ne peut pas faire un objet théâtral de tous les textes oulipiens. Mon critère de choix tenait en 3 points. Les textes devaient être faciles à comprendre, avoir de l’humour et procurer une sensation de vertige ».
Un mariage réussi
Le texte se veut être un hommage aux grands maîtres de ce courant. Cependant, le metteur en scène a élargi ses sources allant jusqu’à consulter ceux qui encore aujourd’hui suivent les idées de l'Oulipo. Cette pièce est une rencontre avec des textes tels que le Roman épistolaire par lettre de Jacques Roubaud ou le What a man de Pérec.
Pour incarner ces textes, les trois acteurs se démènent en occupant humblement l’espace tout en prenant le statut de diseurs virtuoses. Voilà donc une prestation sous contraintes fidèle aux textes mis en scène.