Alors que la mode pluridisciplinaire du vintage sévit de plus en plus, de façon chronique et depuis pas mal d’années, voici un magnifique beau livre de photos prises au cœur de réunions de passionné(e)s de Rock and Roll des années cinquante.
Il s’agit de weekenders, en fait des week-ends prolongés dévolus au rock des années cinquante, et à tout ce qui correspond à ce tropisme fort, voire irréductible.
Toute cette mouvance se voit mise en images grâce au recueil du photographe belge : «50’s Today», préfacé par l’écrivain belge
Un petit résumé de l’histoire récente de ce mouvement plus ou moins underground mais persistant et déterminé ne peut faire de tort…
LES PRÉMICES
Samedi 3 mars 1979 : sans que personne ne s’en rende compte alors, une réunion de fans de rock and roll à Great Yarmouth, (Angleterre), exactement au Caister Holiday Centre, est la première manifestation d’une tendance lourde : celle des fous de cette musique et des années cinquante, qui ensemble vivent leur rêve parmi les concerts, les stands de disques et de fringues d’époque, et à l’extérieur les vieilles bagnoles américaines et les hot rods rafistolés entre deux stands de tatouages ou autres. L’attraction principale de ce premier Rock and Roll Weekenderest le vieux routier américain du rockabilly Ray Campi (accompagné par un groupe the RockabillyRebels), remis en selle par Ronny Weiser sur son label Rollin’ Rock qui donne le la, côté States, de la (re)découverte de cette musique séminale et essentielle : le Rockabilly !
Il s’agit du point de départ de la deuxième tournée anglaise Rollin’ Rock, après la première qui eut lieu à la période de Noël 1977, mais sans weekender à la clé encore pour celle-là.
Depuis lors ces raouts joyeux, voire explosifs, sous le signe de l’éternelle fascination des années cinquante avant tout américaines, du rock and roll et de toute une esthétique flamboyante qui y correspond, ont essaimé un peu partout : toujours en Angleterre (dont Hemsby qui a remplacé Great Yarmouth) aux States (Las Vegas), en Espagne, voire en France et encore ailleurs.
©Charles Chojnacki
LES FIFTIES AUJOURD’HUI
Irrésistiblement attiré par cette démarche et par ce syncrétisme global -musique, voitures, hot rods, tatouages, le grand photographe belge Charles Chojnacki a décidé d’être un témoin discret mais très actif et amoureux de ces grandes fêtes à la fois nostalgiques mais sur le mode de"l’éclaterie," si on me permet l’expression, et totalement hors du temps avec la volonté de ne pas circonscrire dans une date et un lieu précis, une série de meetings joyeux et frénétiques, totalement intemporels finalement.
Charles Chojnacki, muni d’un équipement numérique résolument contemporain malgré tout (boîtier Nikon D 600 et un D 700 numérique), s’en est allé un peu partout où les allumé(e)s des années cinquante se rassemblent pour vivre un rêve à la fois sincère, fervent, nostalgique et tellement intense et prégnant que pour la plupart des participant(e)s, le plus souvent jeunes – ce qui est remarquable –il est devenu la toile de fond de toute leur vie.
Souvent même dans la vie de tous les jours.
Si on les pense déguisé(e)s pour de telles occasions, comme les personnes qui par exemple participent à des manifestations folkloriques ou autres, ici il n’en est rien, absolument rien. Il s’agit d’une visible profession de foi en un certain mode de vie. Voire à l’adhésion résolue à certaines valeurs, non nécessairement théorisées, d’authenticité –avec une dimension quasiment théâtrale qui saute aux yeux - et de refus d’un certain grégarisme d’aujourd’hui jugé trop fade et sans attrait.
Charles Chojnacki photographie en général au plus près ses sujets (y compris féminins, en général pas du genre timide ou effacé, pour dire le moins !).
Inutile de dire que les codes et diktats contemporains des modes sont ignorés et remplacés par cette célébration d’une manière de vivre à jamais reliée à une époque prodigieusement dynamique et optimiste.
Et à une musique galvanisante qui prend aux tripes et fait battre les cœurs bien plus fort, loin des formatages ultracommerciaux rassurants, stérilisants et ennuyeux à mourir.
©Charles Chojnacki
C’est à partir de 2009 que Charles Chojnacki a entamé ses premiers safaris photos chez les Rockers, les Cats, les Teddy Boys et Girls et les allumé(e)s parfois hautement pittoresques mais toujours authentiques et brut(e)s de décoffrage. Un public ultrabigarré, pour le moins spécifique et particulier et du genre inoubliable.
Le photographe immortalise dans 50s Today les vêtements d’époque, les tatouages, les attributs idoines (lunettes vintage et autres), les danses (on danse souvent à deux, eh oui là encore le vintage est éternel !), les jeunes ancêtres (les bagnoles américaines aux formes allongées et aérodynamiques) ; rien de tout cela n’a échappé à l’œil du grand témoin Chojnacki, dont le mélange d’implication personnelle et d’observation avec des yeux de Chimène garantit une vision amoureuse et honnête d’un phénomène inoxydable : la folie du Rock and Roll des années cinquante.
L’irrésistible attraction de celle-ci exercée sur plusieurs générations –dont les jeunes ne sont pas du tout minoritaires, ce point est essentiel voire vital – correspond à une décennie inoubliable à jamais, qui a conquis des galons iconiques d’éternité en pétaradant comme une Chevrolet ou une Triumph de rebelles sur les routes de notre siècle, comme un gang immortel qui descend encore sur la ville, avec les seules armes de la passion et de la fureur et de la joie de vivre mêlées !
CHRISTIAN NAUWELAERS