Toute la semaine, tous les jours, nous vous conseillons les livres jeunesse que nous avons aimés. Peut-être dans ce choix, un ou plusieurs livres vont vous donner envie d'écrire… ben oui, pourquoi pas !
Suite de notre chronique où régulièrement des auteurs vont nous donner leur choix de lectures aussi bien « jeunesse » qu'« adulte », les livres qu'ils aiment, les livres qui les ont fait grandir, les livres qui ont fait hier ce qu'ils sont aujourd'hui.
Cette semaine nous avons demandé à Eli Esseriam parce qu'en plus d'être bonne chroniqueuse à la verve enlevée, sa série Apocalypsis (Nouvel Angle / Matagot), nous a prouvé qu'elle était avant tout un fantastique auteur…
L'Immortalité, de Milan Kundera (Folio)
Le seul livre que je peux relire infatigablement avec le même plaisir et un émerveillement intact. Bluffant d'intelligence, Kundera est indéniablement un maître de la philosophie contemporaine, comme en témoigne n'importe lequel de ses livres. Sulfureux à souhait, perfectionniste et génial, chaque page est une claque. Je l'ai découvert vers l'âge de 13 ou 14 ans et notre histoire d'amour est sans nuage depuis ! L'Immortalité parle du besoin de transcender son existence, de laisser une trace pérenne pour survivre d'une manière ou d'une autre. Kundera analyse les méthodes généralement vaines qu'on utilise pour y parvenir...
Antigone, de Jean Anouilh (La Table Ronde)
Anouilh connaissait par coeur le mythe de l'Antigone de Sophocle et, durant la période trouble de la Seconde Guerre mondiale, il décide la réécrire. Il fait de l'héroïne de tragédie grecque une allégorie de la Résistance, qui s'oppose, s'indigne et s'offre en sacrifice. Son Antigone est incroyablement puissante, touchante. Le texte est sobre, court, efficace, d'une modernité absolue. Il trouve une résonnance dans chaque acte d'opposition audacieuse, de révolte justifiée.
La Mecque-Phuket, de Saphia Azzedine (Leo Scheer)
Fairouz et sa soeur vivent en banlieue de Paris avec leurs parents algériens. Elles décident de leur offrir le pèlerinage à la Mecque que tout musulman se doit de faire et, pour y parvenir, elles vont cumuler petits boulots et sacrifices. Mais une fois la somme réunie, elles sont tentées d'utiliser l'argent pour elles, au mépris de leur culpabilité quasi génétique. Saphia Azzedine est un auteur magnifique. Le style est cru, cinglant et politiquement incorrect. C'est drôle, c'est bon, c'est intelligent. Il y a une justesse permanente des émotions, des dialogues. Ce n'est jamais ni pathos, ni caricatural. Chaque roman de sa main est une réussite.
Herman et Dominique, d'Alexandra Pichard (Thierry Magnier)
Herman et Dominique est, soi-disant, destiné aux enfants, et même aux tout-petits, comme son minuscule format cartonné le laisserait penser de prime abord. Mais les adultes y trouveront de quoi s'amuser, et c'est déjà un joli cadeau en soi ! Herman est un petit monsieur à moustache et lunettes, passablement ordinaire (comme on s'y attend de la part d'un Herman). Il vit avec Dominique, sa moule domestique... Mais un beau matin, cette dernière disparait. Elle a laissé un mot disant qu'elle ne reviendrait jamais.
Quand je serai grand, je serai le Père Noël, de Grégoire Solotareff (Ecole des Loisirs)
Voilà ma madeleine de Proust littéraire. Ce livre de Solotareff, je l'avais en grand format et je le connaissais absolument par coeur. Les illustrations de cet album sont magnifiques, à la fois enfantines et inquiétantes. Les couleurs employées participent grandement à donner à l'histoire une ambiance tout à fait particulière et mystérieuse. Les éléments comiques adoucissent l'ensemble qui suscite toujours en moi un plaisir puéril difficilement explicable. Je n'en dirai pas plus quant à l'histoire: il FAUT la découvrir soi-même...
Eli Esseriam est infirmière de formation. Le premier tome d'Apocalypsis paru en octobre 2011 et les 4 autres tomes ont su convaincre assez rapidement une belle communauté de lecteurs. Elle est également chroniqueuse (romans et albums) pour L.H.S.F depuis début 2011.