Nouvel exploit, des frères Brizzi : en début d’années, ils avaient adapté un monument littéraire, L’Enfer de Dante, en noir et blanc. Plus de 10.000 exemplaires vendus et l’idée frémissante que la collection ainsi ouverte aux éditions Daniel Maghen avait quelque chose à dire. « Dante Alighieri est à la belle Italie ce que Cervantès est à la fière Espagne », assure l’éditeur.
Voici comment Don Quichotte surgit, dans un format hors norme pour une bande dessinée, portant un regard neuf, tendre et exceptionnel sur ce chevalier caricatural — et pourtant plus légendaire que les héros des livres qui l’abreuvent. Cervantès n’avait eu aucune pitié, jetant son personnage au pied de moulins, lui faisant mordre la poussière… Quand ce ne sont pas des raclées qu’on lui inflige, seule réponse humaine à la folie qui s’est emparée de lui.
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« Trop souvent pathétique et ridicule, sentencieux et même condescendant à l’égard du paysan qui l’accompagne, Sancho, qui n’est peut-être là que pour fuir une existence morne, Don Quichotte nous entraîne irrésistiblement dans cette recherche obsessionnelle de la notoriété », clame l’éditeur.
Dans cette adaptation, les frères Brizzi rendent pourtant justice à Don Quichotte. « Don Quichotte, au fur et à mesure de ses mésaventures, se rend attachant parce qu’il est mû par le désir de bien faire », expliquent-ils. Et on y adhère tant le dessin s’impose en majesté : moins réaliste que l’original, plus drôle, assurément : le vieux farfelu, dont l’erreur fut de « trop aimer les livres » devient ici grandiose, sublime.
Et si l’on a souligné l’absurdité d’un homme chevaleresque, dans une époque qui ne veut plus de ces chevaliers d’antan, c’est parce qu’il ignore tout le tragique dans lequel il se débat. Ici, le pittoresque et le comique l’emportent, avec brio.