Louis-Ferdinand Céline n'en finira probablement jamais de susciter admiration et répulsion. Mario Vargas Llosa, auteur péruvien et adopté depuis par l'Espagne a ainsi tenu à ajouter sa pierre et son hommage à l'oeuvre célinienne. Celle du « dernier auteur maudit », a-t-il déclaré dans El Pais.
« Il serait intolérable dans son pessimisme et sa noirceur, s'il n'y avait cette captivante puissance que dégage un langage virulent », précise-t-il. Ne s'attachant pas à ce que la vox populi a retenu de Céline, il s'insurge contre le refus de lui reconnaître ce talent typique, « à cause de ses sympathies hitlériennes ». Sauf que « personne n'a décrit aussi bien que lui, avec une intuition géniale, cette humanité obtuse et stupide ».
S'attardant un peu plus sur le style et ses fameux points de suspension, Vargas estime que Céline a créé une « véritable révolution » dans la narration. Mais après le Voyage et Mort à crédit, le souffle s'est épuisé. Son oeuvre « ne s'est plus élevée au-dessus de cette petitesse et médiocrité dans lesquelles vivent tous ses personnages, à demi asphyxiés et au bord de l'apoplexie hystérique » considère Vargas.
« Tous [ses personnages] sont marqués par le ressentiment, une certaine forme d'égoïsme, de bêtise et de méchanceté », effectivement, mais ils ne sont, de ce point de vue, que trop humains. « Peu d'écrivains ont décrit mieux que Céline cet esprit tribal qui est le plus lourd des poids retenant une société qui essaye de progresser et laisser derrière elle les préjugés et les habitudes fâchées avec la modernité. »
Une impossible ouverture à l'autre
Ou encore, ils « sont nationalistes et provinciaux, dans le pire sens de ces mots : parce qu'ils ne veulent pas voir ni regarder au-delà de leur nez. Comme Ferdinand Bardamu dans le Voyage ou Ferdinand dans Mort à crédit », leurs voyages pour découvrir se font en pure perte ! Tout devient « inutile : ils ne peuvent ni comprendre ni apprendre quelque chose sur les autres parce que, du fait de leurs préjugés, de leur méfiance ou de leur volonté, ils sont incapables de s'ouvrir aux autres et de se montrer eux-mêmes. »
Rappelons que les Éditions Montparnasse ont édité un DVD sur Céline, que nous ne saurions trop vous conseiller pour découvrir un témoignage authentique, tiré d'images d'archive. L'écrivains qui disait : « L’homme est nu, dépouillé de tout, même de sa foi en lui. C’est ça mon livre. »