Et voilà cette fois c'est sûr les vacances sont finies. Il faut reprendre son train-train, se remettre au travail. En une expression, il n'est plus temps de « peigner la girafe ». Une expression bien mystérieuse tout de même. Quel rapport occulte peut-il bien y avoir entre le fait de « peigner la girafe » et l'oisiveté.
Cette expression trouverait son origine au moment de l'arrivée de la première girafe en France. Nous vous proposons cependant de remonter un tout petit peu plus loin dans le temps, pour bien comprendre dans quelles circonstances cela s'est produit. Nous sommes à la fin du XVIIe siècle, pour beaucoup de français la girafe est un animal merveilleux. Au sens magique du terme. C'est à dire que personne n'en a encore vu, et l'on doute de son existance. Furetière écrit même : « Giraffe : Animal farouche dont plusieurs auteurs font mention mais que personne n'a vu... Mais la plupart des curieux croyent que c'est un animal chimérique ».
Plus d'un siècle plus tard, c'est dans ce climat d'incrédulité que la première girafe que l'on a vue en France foulera le sol de notre pays. En effet, le pacha d'Égypte, Mohamed Ali décida d'en offrir une à Charles X. Elle est donc arrivée à Marseille ce 26 octobre. Elle resta dans la ville tout l'hiver. Au printemps elle fût conduite à Paris. Le voyage se déroula à pied et dura quarante jours, amassant des foules de curieux assez considérables. Un certain nombre d'auberges dans lesquelles le cortège faisait halte prirent par la suite un nom contenant girafe, du style « à la girafe ». Elle arriva le 30 juin 1827 à Paris.
Des girafes partout
Par la suite la France désabusée fut prise d'une sorte de girafomanie. Les tapisseries, les assiettes en céramique, les plaques de cheminée figuraient des girafes. Avec un tel engouement difficile d'empêcher la girafe de rentrer aussi dans le langage. Il y a bien sûr la métaphore de la girafe pour désigner une femme pourvue d'un grand cou ou tout simplement pour désigner une femme grande. Il y a aussi fort à parier que notre girafe ait inspiré l'expression « peigner la girafe ».
On retrouve d'ailleurs trace de cette expression dans le Larousse Illustré de 1898 : « Familier : Peigner la girafe : ne rien faire ». Notre première girafe résidente en France était morte en 1845. Son souvenir devait donc être encore bien présent dans les mémoires, et l'expression a pu faire son bout de chemin avant d'être recensée par le dictionnaire. Pour revenir à la girafe, elle a été empaillé et on peut la voir encore de nos jours au muséeum d'histoire naturelle de La Rochelle.
Le mystère du peigne
Une dernière question se pose à nous, Pourquoi le verbe « peigner » ? Une des explications fournies par nos collègues d'expressio réside dans l'invention d'une histoire mettant en scène le gardien du Jardin des Plantes où résidait l'animal. Ce gardien aurait été pris en flagrant délit d'oisiveté et pour se justifier aurait répondu « je peignais la girafe ». Il semblerait cependant que cette histoire ait été inventée plus tard.
Une autre des explications possibles serait de voir dans la girafe une métaphore pour le sexe masculin et l'action de « peigner » serait une métaphore de la masturbation, une pratique stérile qui n'est pas jugée comme utile. Nous voici donc revenus à notre sens premier « ne rien faire d'utile » ou tout simplement « ne rien faire du tout ».