Après concertation avec les avocats et membres des comités de soutien présent au procès d’Asli Erdogan à Istanbul, il nous parait opportun de reporter le rassemblement prévu le 12 janvier à une date ultérieure. En effet, à l’issue de la première journée du procès, le 29 décembre, Asli et sa compagne de cellule, Necmyie ont été libérées de façon conditionnelle, et ce jusqu’à la reprise du procès le 14 mars, date à laquelle le verdict sera prononcé (décision du tribunal confirmée le 2 janvier). Les avocats d’Asli remercient toute la communauté internationale pour l’extraordinaire mobilisation en soutien aux personnes emprisonnées. Aujourd’hui, ils espèrent une issue favorable à ce procès.
La libération conditionnelle d’Asli Erdogan et Necmiye Alpay, jugées il y a quelques jours en compagnie de six autres accusés, n’enlève rien aux exactions que la Turquie perpétue. Ce 2 janvier, le procès a repris, et, si l’ambiance est un peu plus détendue, les enjeux n’en sont pas moins cruciaux.
Dans un récent communiqué, le ministère des Affaires étrangères a assuré suivre avec attention la procédure, désormais appelé Procès Özgür Gündem, en référence au quotidien mis en cause. Jean-Marc Ayrault expliquait ce 29 décembre « Notre consulat général à Istanbul assiste aujourd’hui, avec plusieurs autres représentations d’États membres de l’Union européenne, à la première audience de leur procès. Nous sommes également préoccupés par les informations faisant état du placement en garde à vue ce matin du journaliste Ahmet Sik. »
Et le MAE de rappeler, ainsi que le ministre l’avait fait lors de son déplacement le 24 octobre, que « la lutte légitime contre le terrorisme ne saurait justifier que soit porté atteinte au respect de l’État de droit et des libertés fondamentales et au respect de la liberté d’expression ».
Rassemblement pour Asli, le 12 janvier
En France, l’un des comités de soutien à Asli Erdogan a décidé de lancer un appel pour un rassemblement devant l’Ambassade de Turquie, ce 12 janvier, à 14 h 30. Jean-Paul Oddos et Claude Guest, qui centralisent les informations, expliquent à ActuaLitté : « J’ai écrit au nom du Comité à l’ambassadeur de Turquie, avec copie à la Préfecture de police de Paris. L’Ambassadeur s’est déclaré prêt à recevoir une délégation, mais il souhaiterait que ce soit en dehors d’un rassemblement. Ce que nous n’accepterons naturellement pas. »
Ismail Jakki Musa, de l'ambassade, indiquait dans son courrier : « Je tiens à vous informer que moi-même et mes collègues, nous restons à votre disposition pour aborder le cas d’Asli Erdogan, membre du conseil consultatif du journal Ozgur Gundem qui a été fermé à cause de ses liens avec l’organisation terroriste PKK. » La leçon est bien apprise...
Juste avant d'entrer dans la salle avec Asli Necmyie et Bilge pic.twitter.com/yjN88uqFv3
— Valérie Manteau (@ManteauV) 2 janvier 2017
Dans sa dernière lettre d’information, le comité rappelle combien la libération d’Asli et des autres accusés est fragile : « Cette libération est provisoire, le procès et les charges ne sont pas abandonnés : mais cela va permettre à Asli de se soigner, de retrouver sa famille et ses amis, de mieux organiser sa défense. »
Et de poursuivre : « N’en doutons pas : c’est n’est pas un geste humaniste de la part de ceux qui l’ont brutalement arrêtée et jetée en prison, qui continue d’arrêter ou de maintenir en prison des centaines de journalistes ! C’est la mobilisation internationale qui a fait reculer le gouvernement turc. C’est pour cette raison que le Comité de soutien appelle à poursuivre la mobilisation, par tous les moyens disponible. »
Des écrivains et journalistes, comme Tiéri Briet et Yann Pereau (Les Inrocks), se sont d’ailleurs rendus à Istanbul pour assister au procès et en rendre compte par la suite. Alors que ce dernier a repris, ils devraient être encore en Turquie pour suivre l’audience.
L'avocate dit que ce proces est celui du journalisme, pas du terrorisme
— Valérie Manteau (@ManteauV) 2 janvier 2017
Les politiques désormais impliqués
Le comité indique également que la semaine dernière, l’interpellation des femmes et hommes politiques français s’est maintenue : Philippe Charrier, ancien directeur des bibliothèques de Strasbourg, a ainsi écrit à douze députés de sa Région. Aucun pour le moment n’a fait part d’une réponse ou d’une intervention publique du Ministre des Affaires étrangères...
La ministre de la Culture, Audrey Azoulay, avait elle-même salué la libération, rappelant que l’auteure était toujours « poursuivie et reste sous contrôle judiciaire ».
Notons que Jean-Marc Ayrault a également pris le temps de répondre au Comité de soutien, évoquant des contacts « établis avec ses proches et sa famille ». Et de noter : « Les mesures qui ont été prises ces derniers mois en Turquie dans le cadre de l’état d’urgence, notamment la fermeture de centaines d’organes de presse et les arrestations de journalistes et écrivains comme Mme Erdogan, constituent des développements très préoccupants. »
Si le droit à un procès équitable « et le respect de la liberté d’expression » figurent au premier rang des engagements que la Turquie doit respecter, « la France continuera à porter ce message, afin que prévalent les droits de l’homme et les libertés fondamentales en Turquie ».
Asli Erdogan durant son procès : “Je vais m’exprimer comme si le Droit existait…”
Par ailleurs, la ministre de la Culture a répondu au courrier du Maire d’Asprières (12 700) en l’assurant qu’elle suivait de près cette question, qu’elle avait écrit à son homologue turc pour lui faire part de l’inquiétude de l’opinion internationale devant le sort réservé aux journalistes de son pays. Dans cette lettre, Audrey Azoulay explique, à propos d'Asli Erdogan : « Sa détention est intolérable, et la perpétuité demandée par le procureur très inquiétante. »
Le rassemblement du 12 janvier devrait donc être largement suivi.
Avocats d'Asli et Necmyie demandent permissions pr elles de sortir du territoire pr leurs activite d'ecivains et activistes feministes
— Valérie Manteau (@ManteauV) 2 janvier 2017
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