est une journaliste franco-syrienne.
Son livre se situe à mi-chemin entre le reportage et l’histoire.
Reportage parce que, au fil des pages, elle nous décrit les dernières années de la Syrie et des évènements dramatiques qui la secouent frénétiquement. Et ce jusqu’en février 2013. Mais c’est le lot du compte rendu journalistique que d’être déjà du passé dès qu’écrit.
Histoire parce que, imaginant une relation épistolaire, par Internet interposé, avec son père décédé, elle parcourt toute les secousses politiques auxquelles la Syrie a été soumise, comme nombre de pays du Moyen Orient, au cours des dernières années.
Ce mode narratif lui permet ainsi de relire l’Histoire Contemporaine à la lumière des évènements passés et ainsi d’essayer d’en comprendre les déchaînements d’en expliquer les dérives, tout en gardant un œil rivé sur l’actualité.
Le procédé est original car il permet de redonner la parole à un homme qui a vécu de l’intérieur les soubresauts de la Syrie, entre son indépendance après la Seconde Guerre Mondiale et aujourd’hui, en passant par la création de la République Arabe Unie avec l’Egypte, l’influence du parti Baas, les coups d’état dont le dernier a mené la dynastie Assad au pouvoir et les diverses influences religieuses. Des influences politiques étrangères aux dissensions internes au pays, en passant par les tiraillements entre courants religieux, une certain éclairage est ainsi donné à une Histoire qui est loin d’être racontée dans les manuels scolaires.
Et aussi de rapporter de manière beaucoup plus journalistique le quotidien des évènements et des gens qui, entre Assad et les extrémismes islamistes, tentent de survivre, de faire entendre leur voix, de croire encore à une démocratie possible, de faire revenir la paix et la cohabitation fraternelle entre tous les syriens.
Tout cela est très bien et très instructif.
Pourquoi donc a-t-il fallu que Hala KODMANI se laisse aller à des propos déplacés, même s’il peut être compréhensible que les postures politiques mondiales actuelles, qui montrent tout leur cynisme et leur inefficacité, provoquent l’énervement et l’outrance des propos.
C’est quoi cette suffisance qui l’autorise à écrire que des « revanchards (…) ont écarté les élites » ? Ou a stigmatiser les codes vestimentaires, « symbole de la vulgarité des paysans du régime » ? Ou a imaginer « reprendre la place qui aurait dû être la (sienne) dans le pays » ? Et même s’il est, peut être, vrai que « les meilleurs se sont éloignés, plus souvent de gré que de force, d’un pays qui n’a pas su retenir leurs compétences », prétendre que « seuls ceux qui ne savaient rien faire ailleurs sont restés dans le pays » me paraît totalement déplacé et d’un orgueil démesuré. Oser écrire « on ne peut tout de même pas comparer les Syriens aux Libyens ! Ce n’est pas le même niveau de culture » n’est pas pardonnable quand, par ailleurs, elle constate la défection de certains opposants exilés à une réunion à Antalya, en Turquie, à l’un des motifs qu’ils ne savaient pas « qui payait les frais ».
Dommage.
Pour moi, elle a gâché son livre qui ne sert pas la cause juste qu’elle prétend défendre.