Ce court nouveau récit de a ceci d'étonnant qu'il en dit bien plus qu'il semble ne vouloir le laisser paraître à la première lecture. D'abord, il est traduit de l'italien, chose bien étrange pour un livre écrit en suédois et destiné au public français (surpris alors d'être dépossédé, le temps d'une lecture, du traducteur complice de Larsson, .)
Ensuite, il s'avère en fait que ce supplément au roman Long John Silver (1995) n'est en fait qu'un passage de la version originelle qui fut écourtée pour sa première parution en Suède, et proposé aujourd'hui, de manière indépendante et réservé presque exclusivement alors aux inconditionnels de Long John Silver.
Vous suivez ? Non. Alors, n'omettez pas de lire la postface au récit, vraiment intéressante, qui raconte la genèse du roman, les conditions dans lesquelles il fut écrit (l'écrivain vivait sur un bateau), explique avec précision et curiosité les difficultés rencontrées par l'auteur pour , dans un premier temps, se défaire de la fiction et de la réalité du mythe autour du pirate puis, dans un deuxième temps, ses efforts pour faire vivre son personnage imaginaire dans une réalité historique précise, lui offrir la possibilité de s'intégrer à des événements réels sans que le lecteur ne doute un seul moment que tout ceci puisse être un jeu de dupes. Ou « L'art d'égarer le lecteur », à l'instar de William Defoe, inspirateur de Stevenson (pour rappel, auteur de l'Ile au trésor, père du personnage Long John Silver).
Si vous avez encore un peu de mal à suivre, persévérez dans la lecture de ce court ouvrage pour comprendre que Long John Silver ne fut pas seulement un simple personnage de roman. Puisqu'il aurait pu vivre dans la réalité historique ; « il était un personnage plausible dans le monde réel », un homme véritable, libre et seul. Laissez-vous conter sa personnalité redoutable et fascinante, si singulière, intégrez-le en profondeur.
Ainsi, de cette postface instructive, de cette réflexion autour de l'écriture, du rapport entre fiction et réalité, entre imaginaire et réel, entre vrai et faux, entre sincérité et mensonge, il vous sera ensuite agréable et divertissant de suivre La dernière aventure de Long John Silver et d'apprécier avec amusement et un léger haut-le-cœur le sort peu enviable qu'il réserve à Charles Barrington, un lord déchu, avide et infâme, résolu à se lancer dans le commerce négrier.
Il est probable alors que l'envie de relire Long John Silver naîtra, avec le sentiment d'être capable à présent, au-delà des aventures racontées, de pénétrez l'âme du pirate avec moins de crainte, de ressentir le souffle ardent de liberté et d'indépendance qui l'agite et l'ébranle aussi parfois.
Même si la parution indépendante de ce court texte répond sans doute davantage à une finalité de l'éditeur, plus marchande que littéraire, le lecteur aurait tort de bouder son plaisir car au final, la lecture est plaisante et subtile, invite à s'interroger sur le rôle de la littérature sans pour autant cesser de divertir.
C'est là le bel équilibre de la prose de Björn Larsson.
Björn Larsson participe au festival des Etonnants Voyageurs de Saint-Malo.