J’ai relu le premier roman de Maurice Bedel, Jérôme 60° Latitude Nord, prix Goncourt en 1927. Bedel est arrivé à la littérature sur le tard, volontairement selon ses dires. Il explique à Frédéric Lefèvre au moment de recevoir le Goncourt : « Ce n’est pas sans dessein que je livre ma première œuvre à quarante ans. Dès le moment où j’avais décidé de me donner aux lettres — comme je vous l’ai dit, cela date du collège — j’ai accumulé documents sur documents, non par écrit, je ne note jamais rien, mais en vivant une existence aussi complète et complexe que possible, c’est un système qui peut avoir du bon, qui a réussi singulièrement à Proust, par exemple » (Les Nouvelles Littéraires, 10 décembre 1927). Plus jeune, étudiant les maladies mentales, la littérature et la peinture, Bedel passe ses matinées à la Salpêtrière (il soutiendra une thèse en psychiatrie à la Faculté de médecine), suit l’après-midi les cours de Faguet et de Lévy-Bruhl à la Sorbonne et fait le soir de la peinture à l’Académie Jullian. Il fait des vers, publiant un recueil chez Grasset en 1913, avant d’être mobilisé comme aide-major ; son Journal de guerre. 1914-1918 a été édité par les éditions Tallandier à l’occasion du centenaire de la Grande Guerre. Après la guerre, cosmopolite dans l’âme, reporter international, Bedel voyage beaucoup, comme il le fera d’ailleurs jusqu’à la fin de sa vie, parcourant tous les continents.