aux amis des Éditions de La Différence.
Les Éditions de la Différence, qui ont conclu, voici près de huit mois, un accord de partenariat avec la radio Aligre FM (93.1), au terme duquel une émission leur est réservée le premier dimanche de chaque mois, de 11h à 13h, sont aujourd'hui heureuses de donner la parole à Philippe Vannini, créateur et président de cette radio, dont elles partagent la révolte, la volonté d'indépendance, la vision de la vie.
Les radios libres, une liberté toujours à reconquérir
Faire vivre et développer une expérience radiophonique, en maintenant, tout au long de ces trente dernières années, une farouche indépendance éditoriale et économique face à des groupes financiers, politiques, confessionnels ou communautaires, n'a pas été chose aisée, mais constitue la plus belle réussite d'Aligre FM.
En effet, que reste-t-il de toutes ces radios écloses après mai 81 avec l'abolition du monopole d'état sur la radiodiffusion ? Tous les espoirs étaient permis, en termes de liberté d'expression, de créativité, de mise en œuvre d'un rapport nouveau entre les animateurs de la radio, les intervenants et l'auditeur. Un nouvel univers médiatique semblait s'ouvrir.
Mais, lorsque l'on parcourt aujourd'hui la bande FM, on ne peut que déchanter très vite. Elle est envahie par des radios commerciales, dépendantes de réseaux qui n'ont pour seul souci que d'asséner des messages publicitaires à longueur de journée à des jeunes, souvent démunis, engendrant ainsi un sentiment de frustration et d'exclusion face à un monde où le consumérisme serait seul garant du bonheur absolu. Même la liberté de choix que constitue la programmation musicale a été anéantie et remplacée par l'achat d'espaces par les maisons de disques.
Face à cette hécatombe, hormis les radios du service public, ne subsistent que quelques radios associatives fortement impliquées dans des problématiques sociales et culturelles. Mais elles aussi, et elles sont toutes concernées, doivent faire face à des tracasseries administratives permanentes qui deviennent de véritables obstacles au maintien et au développement de leurs programmes et sont même attentatoires à leur survie.
Le Conseil régional d'Ile-de-France est un bel exemple en la matière. Les associations vont bientôt passer plus de temps à la gestion qu'à la réalisation des actions sociales et culturelles pour lesquelles les crédits ont été votés. On se trouve face à une profonde entrave au fonctionnement démocratique et aux décisions prises par les élus. Là encore, l'économique a pris le pas sur le politique. De nombreuses associations commencent à se mobiliser pour dénoncer cette « gestiocratie », quelque peu autiste, aux conséquences désastreuses. À titre d'exemple, Aligre FM n'a pu reconduire deux contrats de techniciens car le règlement de subventions, pourtant votées, a été reporté de plus d'un mois pour un différentiel de décimales sur un bilan. Heureusement, nos radios, nées de la lutte, sont habituées à se battre, avec le soutien de leurs auditeurs, qui sont aussi des électeurs. Et, dans cette période de crise, elles ont un rôle de plus en plus important à jouer pour la défense de la culture et la création du lien social.
Aligre et le livre
Toutes les disciplines culturelles se reflètent au travers d'émissions spécifiques dans les programmes d'Aligre: théâtre, cinéma, arts plastiques, photo, et tous les genres musicaux, sont largement représentés. Mais une attention toute particulière a été réservée à la littérature et le livre à qui, dès sa création, Aligre FM a choisi de donner une très large place. Ainsi Les Jeudis littéraires, créés en 1983, est l'émission littéraire qui a la plus grande longévité sur la bande FM (Le Masque et la Plume n'étant pas spécifiquement littéraire). Chaque jeudi, pendant deux heures, des écrivains, éditeurs, directeurs de collection, sont reçus pour parler de leurs ouvrages dans une ambiance conviviale, propre à faire entrer l'auditeur dans l'univers de l'auteur. Un souci particulier est porté à la découverte de nouveaux talents. Marie N'Diaye, Christine Angot, et même Michel Houellebecq n'ont-ils pas fait leurs premiers pas radiophoniques sur les ondes d'Aligre FM ?
Il reste cependant que la célébrité acquise n'altère pas notre liberté de choix. Ainsi Houellebecq, après la publication de Extension du domaine de la lutte, n'a plus été reçu, ni chroniqué favorablement, malgré son succès médiatique et commercial. Nous ne pratiquons aucun manichéisme et sommes attentifs aussi bien aux auteurs des grandes maisons d'édition qu'à ceux de très petites structures. Seule la qualité d'écriture importe.
De grands écrivains nous ont honorés de leur présence, voire de leur amitié : Julien Green, Annie Ernaux, Michel Butor, Serge Doubrovsky, Claude Roy...
Mais nous sommes aussi très attentifs à l'ouverture sur la littérature étrangère. C'est ainsi que nous avons été les seuls, avec France Culture, à diffuser un entretien, réalisé en 1989, avec Tomas Transtormer, Prix Nobel 2011. D'autres, comme Toni Morison et Antonio Lobo Antunes, ont été reçus bien avant leur célébrité actuelle. Nous avons également accueilli Alberto Moravia, Antonio Tabucchi, Claudio Magris, Enrique Vila-Matas, M.V. Montalban, Julian Barnes... La liste de ces rencontres est riche de milliers de nom, qui constituent une véritable malle aux trésors que nous ouvrirons tout au long des mois à venir, pour le plus grand plaisir, on l'espère, de nos auditeurs.
L'Œil libre
Le livre d'art, aussi, est omniprésent sur notre antenne où l'on s'efforce de le faire sortir du rôle de bel objet sédentarisé sur les tables de salon. Nous attachons une importance toute particulière au texte de ces livres ou catalogues, qui jouent un rôle important dans l'émulation du plaisir esthétique en ouvrant sur des combinatoires de lecture.
Des artistes interviennent, tels Alechinsky, Fromanger, Jacques Monory, qui ont cotoyé dans nos programmes de grands historiens d'art comme Daniel Arasse, Jean Clair, Jean-Louis Prat...
Une attention toute particulière est également attribuée à la photo dans la diversité de ses genres, avec notamment Édouard Boubat, Bernard Plossu, William Daniels...
La Différence sur Aligre FM
Établir un partenariat avec les Éditions de la Différence était, pour Aligre FM, dans l'ordre naturel des choses, car nos liens datent de l'origine d'Aligre FM. Tout au long des années, Les Jeudis littéraires ont accueilli des dizaines d'auteurs de cette maison d'édition qui n'a pas à rougir d'un seul des titres de son catalogue, chose très rare dans le paysage éditorial français.
De plus, comme nous, les dirigeants et les collaborateurs de La Différence font partie de ceux qui ne baissent pas les bras. Ils croient qu'un autre monde est possible et que la culture demeure une arme redoutable.
Permettre à La Différence d'avoir un espace radiophonique régulier sur notre antenne, c'est favoriser la rencontre de nos auditeurs avec ce que la littérature représente etoffre de meilleur.
Aligre FM : 93.1 (Paris Ile-de-France)
Les Jeudis littéraires, chaque jeudi de 10h à 12h (www.lesjeudislitteraires.com/blog/)
L'Œil libre, chaque mardi de 11à12H
Les Rendez-vous de la Différence, le 1er dimanche de chaque mois de 11h à 13h