« On ne peut plus entrer quelque part, on ne peut plus ouvrir un bouquin sans voir un putain de zombie. Il y a trop de zombies. Beaucoup trop de zombies. » Ce n'est pas moi qui le dis, mais Freddy Merckx lui-même, héros de Z comme Zombies, dernier délire de Jerry Frissen, publié par les Humanoïdes Associés. Dans un Los Angeles du futur (en 2069, très précisément), Freddy est un white trash plein aux as.
Il passe la journée devant sa télé à écran plat, à bouffer des plats industriels et à écluser des bières, son sac Louis Vuitton plein de liasses posé sur ses genoux. Le pays prend l'eau de toutes parts depuis que les zombies se sont installés à côté des humains (tout cela peut se relire avec plaisir dans les deux tomes de The Zombies that ate the world, de Frissen et Guy Davis, chez le même éditeur.) Une nouveauté, tout de même : un zombie milliardaire a décidé de nettoyer les États-Unis : il propose des allers simples vers la lune pour tous les zombies qui ont les moyens. Sur place, ils pourront survivre pour l'éternité, sans devoir cohabiter avec les mortels.
Au scénario, Frissen s'en donne à cœur joie. Entre les mammouths zombie et les hordes de candidats astronautes en lambeaux, il suffit de quelques armes automatiques aux mains d'un citoyen frustré pour causer un carnage mémorable. Et que dire d'un rapt d'enfants mené par une bande de zombies au volant d'une épave ? Ne s'embarrassant ni de psychologie fine, ni de vraisemblance lourdingue, le scénariste joue volontiers la surenchère au second degré. On est loin de l'atmosphère oppressante de Walking Dead ; ici, tout se joue sur le mode parodique et jouissif.
Alors que les morts-vivants sont à la mode, que bien des théoriciens pontifient sur les interprétations à donner à l'engouement pour ce thème (angoisse d'une fin de civilisation, égoïsme exacerbé et peur de l'intrusion des autres dans la sphère privée, déshumanisation de notre société et ainsi de suite), Frissen remet l'église au milieu du village et rappelle que les vrais zombies sont avant tout de la chair à canon scié et une source infinie d'humour macabre.
Trait épais et mise en scène dynamique
Jorgue Miguel, est un dessinateur portugais. C'est lui qui reprend le flambeau de Guy Davis, pour mettre en images les chairs putréfiées, les os saillants et les yeux cavés. Dans une sorte de ligne claire au trait gras, il compense par des cadrages dynamiques et des effets de mise en scène (abondance de contre-plongées, gros plans et de cases en pleines pages, par exemple) la quasi-absence de décor. L'attention se concentre dès lors sur les personnages et les explosions de viscères. Comme le scénario, le dessin ne s'encombre pas de réalisme inutile, il joue volontiers la surenchère et le clin d'œil.
Drôle et lourd à la fois, Z comme Zombies est une série à prendre pour ce qu'elle est : un délire roue libre, signée par le scénariste de série B le plus prolixe du moment. Et méchamment drôle, ce qui ne gâche rien. D'ailleurs, je ne résiste pas à lui laisser le mot de la fin :