Le Comte: - Qui t'a donné une philosophie aussi gaie ?
Figaro: - L'habitude du malheur. Je me presse de rire de tout, de peur d'être obligé d'en pleurer.
Beaumarchais, figure singulière du siècle des Lumières, s’impose avec sa trilogie de Figaro comme l’un des grands artisans de la transformation du théâtre en outil de critique sociale. Du Barbier de Séville au Mariage de Figaro, puis à La Mère coupable, c’est toute une fresque — le « roman de la famille Almaviva » — qui se déploie, mêlant légèreté comique, satire acérée et accents tragiques.
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Si Figaro incarne la verve et l’insolence du valet devenu héros populaire, il est aussi le miroir d’une époque en mutation. Avant la Révolution, ses réparties circulent comme des slogans, ses mots devenant autant d’armes contre les privilèges. Admirée par les élites qu’elle égratigne, la comédie de Beaumarchais, longtemps censurée, devient phénomène de société, annonçant l’émergence d’un pouvoir nouveau : celui de l’opinion publique.
Mais au-delà du rire et de l’effervescence, La Mère coupable dévoile une tonalité plus grave. Dans un Paris postrévolutionnaire, le libertinage a laissé place à la mélancolie, les intrigues virevoltantes à la douleur du temps qui passe. Figaro n’y rit plus, il accuse. La comédie vire au drame, révélant l’ambition profonde de Beaumarchais : faire du théâtre un espace moral et politique.
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De la censure à l’institutionnalisation, de la satire à la reconnaissance patrimoniale, la « figaromania » traverse les siècles. À lire — ou relire — dans l’ordre ou dans le désordre, la trilogie ne cesse de voltiger, comme ses personnages, entre passé et présent, rires et larmes, révolte et mémoire.