Il y a Wagner qui perd son chef Evgueni Prigojine, et il y a Wagner qui rythme La chevauchée des Walkyries. Quand les secondes n’auraient jamais reculées à quelques encablures du moment de vérité, le chauve passé de la délinquance à condottière a fait machine arrière… Morale de l’histoire : lorsqu’on franchit le Rubicon, le retour en arrière est non recommandé…
Le Wagner compositeur du XIXe siècle a en réalité acquis sa renommée, plus par sa production textuelle que sa musique en son temps. Des traités esthétiques, mais aussi de philosophie, des nouvelles, de la poésie, du théâtre, des pamphlets… et des récits autobiographiques, comme son Carnet brun, journal intime de 1865 à 1882.
En 1864, Wagner est au bord du suicide, entre ses difficultés pour la création de l'important Tristan et Isolde, et les échecs qui s’accumulent comme des perles sur un fil coupé ; avant le miracle Louis II qui se propose de devenir son généreux mécène.
Il y est question d’Opéra - notamment de Parsifal -, mais également de religion - entre autres du bouddhisme -, de politique, d’histoire, de littérature… Ce mystique, manipulateur selon Nietzsche, de l’art, nostalgique d’un passé idéel que l’on retrouve dans ses œuvres, se demande quelle place pour la religion dans la beauté, méprise les boutiquiers et se lamente de la montée en puissance des valeurs bourgeoises. En outre, ce sont ses déboires sentimentaux qui transparaissent, ses difficultés du quotidien.
Cette édition inédite (traduit, présenté et annoté par Nicolas Crapanne) en français de pages publiées pour la première fois en 1975 seulement, tire son nom de cet « épais cahier relié de cuir marron » orné d’une serrure, offert par Cosima Wagner, alors Liszt von Bülow. Aucune référence à ses pensées fascistoïdes donc… « Je crois en Dieu, Mozart et Beethoven. »