#Roman jeunesse

Sale nuit pour les terreurs

Isabelle Perrin, Gary Ghislain

Quand Frank Goolz, son auteur de romans d'horreur préféré, et ses filles, Ilona et Suzie, emménagent dans la maison voisine, Harold espère simplement que sa vie va devenir plus amusante. Mais chez les Goolz, les lumières s'allument sans raison et les objets bougent tout seuls... Et lorsque Ilona lui confie la Pierre des Morts, un objet magique très puissant, Harold sait que rien ne sera plus comme avant. Mais attention ! Mal utilisée, cette Pierre peut se révéler très dangereuse. Harold, sans le vouloir, pourrait bien réaliser ses désirs les plus sombres. Et justement, les terreurs de l'école commencent à disparaître...

Par Isabelle Perrin, Gary Ghislain
Chez Seuil jeunesse

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Pour Ilo, Sisko et Elsa,

les étoiles de mon firmament

 

 

« Ô peuple des étoiles ! Je suis un homme debout près de la rivière, les yeux levés vers le ciel. Comme ces étoiles scintillent au firmament ! Comme leur lumière se projette loin, plus loin qu’il ne m’est possible de voir ! Et qu’en est-il des choses cachées ? »

Livre des morts des anciens Égyptiens

 

 

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Au-delà du pont

 


* * *

 

 

Cela fait des semaines que ma mère est obnubilée par Frank Goolz.

– Viens avec moi, on va aller se présenter ! m’a-t-elle lancé depuis le rez-de-chaussée. J’ai entendu dire que c’est quelqu’un d’adorable. Fou comme un lapin, mais très gentil.

– T’as entendu ça où ? ai-je crié depuis ma chambre.

J’étais assis devant mon ordinateur pour chercher Frank Goolz sur Google, parce que je suis encore plus obnubilé qu’elle.

– Mais partout !

Une photo de lui, qui accompagnait une interview parue dans le New York Times, s’affichait sur l’écran. Pour une superstar de la littérature, il avait l’air aimable et accessible : un homme d’âge mûr avec une tignasse poivre et sel, qui souriait gentiment tout en braquant sur moi des yeux bleus au regard intense.

– Harold, j’ai fait un cheesecake ! Allez, viens !

J’ai repoussé mon fauteuil du bureau et réalisé une pirouette assez cool sur les roues arrière, puis je me suis propulsé jusqu’à l’escalier.

Maman était dans l’entrée, cheesecake dans les mains, vêtue de son imperméable jaune poussin et de bottes en caoutchouc assorties qui lui montaient aux genoux. On aurait dit un canari géant.

– Tu comptes y aller habillée comme ça ?

– Je te signale que tu es encore en pyjama, bananouille.

– Chère mère, sachez que je décline votre invitation, ai-je dit en imitant son accent anglais.

Depuis plusieurs années que nous habitons dans le Maine, aux États-Unis, mon accent à moi s’est complètement américanisé.

– Je vous envoie en ambassadeurs, ton cheesecake et toi. Souhaitez-lui la bienvenue sur nos rives et rappelez-lui d’éviter les sables mouvants à marée basse.

Maman est une passionnée de lecture, et moi aussi. Notre maison est une bibliothèque qui s’agrandit chaque jour. Quand nous avons appris que Frank Goolz avait acheté la propriété voisine, nous sommes allés dans notre librairie préférée de Bay Harbor commander une bonne dizaine de ses romans d’horreur. Nous les avons dévorés dès réception, allongés côte à côte sur le canapé, en lisant tout haut à l’autre les passages les plus effrayants.

– Mais pourquoi tu ne veux pas venir ? Tu adores ses livres ! a-t-elle insisté en ouvrant la porte. Viens et dis-le-lui. Il sera ravi.

– Non, non, c’est bon.

J’ai appuyé sur le bouton et fait joujou avec le monte-escalier, l’envoyant en bas avant de le remonter. Je mourais d’envie de rencontrer Frank Goolz et de lui dire que j’adorais ses romans. Il écrit de formidables histoires sur d’étranges vieux manoirs, des greniers inquiétants, des poupées vaudoues ensorcelées et des momies meurtrières dans des contrées exotiques. Des histoires effrayantes, exaltantes et pleines de folles aventures que je rêve de vivre. Mais voilà précisément pourquoi je ne veux pas le rencontrer dans la vraie vie. Lui est un aventurier, un explorateur, un chasseur de mystères, un homme aux mille légendes et aux livres presque aussi nombreux. Moi, je ne suis qu’un ado en fauteuil roulant.

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Sale nuit pour les terreurs

Gary Ghislain trad. Isabelle Perrin

Paru le 01/02/2018

272 pages

Seuil jeunesse

12,90 €