Comment et pourquoi une femme peut-elle ignorer qu'elle est enceinte pendant quelques mois ou jusqu'à son accouchement ? Comment un foetus peut-il se développer correctement dans le ventre de sa mère sans que cette dernière sache qu'elle est enceinte ? Ce déni de grossesse, mécanisme de défense contre l'angoisse, est-il toujours levé dès la naissance de l'enfant ? Peut-il être suivi d'un déni d'enfant ? Ce sujet est à la fois fascinant et dérangeant. Le déni, mot souvent employé dans le langage populaire, n'est pour autant pas considéré comme une pathologie en France. Il est souvent difficile d'admettre que l'on ne puisse pas voir une réalité visible et pourtant il n'est pas rare (grossesse, annonce de maladie grave...). Ce sujet, mal connu car il touche au sacré et sur lequel il existe peu d'ouvrages psychanalytiques, entraîne aussi des amalgames : déni de grossesse et néonaticides sont souvent associés (meurtre d'un nouveau-né de moins de vingt-quatre heures) alors que, dans les faits, il n'en est rien. Le "double" déni de grossesse l'est à plusieurs titres : dans le déni de grossesse, c'est l'unité corps et esprit qui se préserve contre une angoisse : corps et esprit sont étroitement associés. Ces femmes ne dénient pas seules leur grossesse, elles ont une histoire, un conjoint, une famille. De plus, le monde médical est souvent dans le déni de ce déni, même si cela tend à évoluer très favorablement. Reconnaître ce déni serait reconnaître l'interaction et le pouvoir de l'esprit sur le corps ou, plus précisément, de la psyché sur le corps.
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