L'oubli est précédé par sa mauvaise réputation. Pensé comme un manque de la mémoire, le symptôme d'une dégénérescence annoncée, on le redoute. On cherche à l'oublier bien que l'on sache qu'il sera toujours là. Pourtant, s'il ne faisait pas quotidiennement son oeuvre, on ne pourrait plus vivre, agir ou créer. Oublier est une faculté universelle et vitale dont les modalités d'expression diffèrent de celles de la mémoire : une puissance enfouie en notre être, une force créatrice capable de nous régénérer. A contre-courant des modes et humeurs de notre société, des philosophes, des anthropologues et surtout des artistes n'ont pas oublié d'oublier tous les fardeaux qui se présentent comme des obstacles à leur désir de création. Développer sa capacité à effacer les évènements pesants et traumatisants qui nous conduisent au désastre est moins un risque qu'un pari, dont l'enjeu est de rendre à chaque personne ce qu'elle désire peut-être le plus au monde : affirmer sa réelle singularité, notamment par et dans l'acte créatif.
Par
Pierre J. Truchot, Laetitia Perret, Julie Nakache Chez
L'Harmattan
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