"Il est des êtres, a écrit Soljenitsyne, qui, à l'heure de leur mort, jettent une grande lueur". Certains criminels, à l'approche de l'instant fatal, accèdent à une lucidité expiatrice. Quelle sombre fulgurance traversa Staline au moment de sa propre fin ? A-t-il vu le long cortège des hommes et des femmes qu'il avait envoyés à la mort par dizaines de millions ? Lorsque finalement les médecins se pressaient autour de lui pour tenter des soins inutiles, il réussit de son bras valide à montrer une image épinglée au mur où figurait une fillette nourrissant un agneau, puis il se désigna du doigt. Le moribond cherchait sans doute à signifier son extrême faiblesse. Pervers jusqu'à son dernier souffle, Staline n'eut jamais pitié que de lui-même. Contrairement à ce qui est généralement admis, Staline n'était pas un paranoïaque mais un grand pervers narcissique. Ce dernier diagnostic, fondé sur les propos tenus en privé, est bien plus grave que celui de paranoïa et rend mieux compte des méfaits d'un des plus grands criminels de l'Histoire. On peut espérer qu'une meilleure connaissance de la psychopathologie de ce personnage pourrait contribuer à nous protéger de ses semblables en mobilisant une vigilance particulière dans le champ politique.
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