« Prenez maintenant un sachet de douze nougats. Ouvrez-le. Disposez les nougats dans votre paume. À mesure que vous les contemplez, notez comme les douze petits bonbons s’agencent selon leurs propres catégories : ces deux-ci possèdent chacun en leur sein un morceau de noisette qui les rapproche ; ces trois-là, luisants comme des flaques, s’allient naturellement ; à la surface de ces sept autres petits nougats qui font bande à part, de minuscules grains de sucre ont échappé à la caramélisation… Et maintenant, avez-vous remarqué ? Vous avez oublié les dix-huit galets de l’étape précédente – les douze nougats les ont remplacés dans votre perception. »
PAUL MONTÈS, Petites Collections
et Logique de l’être, manuscrit disparu (s. d.)
« Prenez maintenant un sachet de douze nougats. Ouvrez-le. Disposez les nougats dans votre paume. À mesure que vous les contemplez, notez comme les douze petits bonbons s’agencent selon leurs propres catégories : ces deux-ci possèdent chacun en leur sein un morceau de noisette qui les rapproche ; ces trois-là, luisants comme des flaques, s’allient naturellement ; à la surface de ces sept autres petits nougats qui font bande à part, de minuscules grains de sucre ont échappé à la caramélisation… Et maintenant, avez-vous remarqué ? Vous avez oublié les dix-huit galets de l’étape précédente – les douze nougats les ont remplacés dans votre perception. »
OLIVIER LABROUSSE, Logique de l’être :
aphorismes collectionnistes, PUF, 2011
PAUL MONTÈS
Je récapitule ma journée, ma vie, mon destin.
Tout est relativement simple. Je suis demeuré, malgré tout, un garçon simple.
Ma journée consistera à mettre un point final à mes mémoires et à réunir mes cahiers, carnets & archives personnelles en un tas unique, les ordonner par date, thème et type de document, les rassembler par un élastique préparé pour l’occasion puis à porter le tout chez monsieur Théodore pour que les journalistes, historiens et petits enfants en aient connaissance en temps voulu.
Ma vie aura consisté en un assemblage épars de nougats, de galets et de chagrins : il était dit que je manquerais d’affection.
Mon destin (« le Destin de Paul Montès », comme on l’appellera bientôt) se réalisera ce soir mais, pour d’évidentes raisons de confidentialité, je préfère ne pas trop en dire pour le moment – on n’est jamais si bien trahi que par une trace écrite.
Aujourd’hui, on est le 14 décembre 2014.
C’est aussi en décembre, pas loin du 14, qu’eut lieu le déclenchement de mon histoire. Non pas le début, ni le commencement (mon histoire court depuis plus longtemps que moi, depuis des siècles, car elle est universelle) : le déclenchement. Et, de même que le dernier acte de mon aventure débutera ce soir chez monsieur Théodore, de même c’est chez monsieur Théodore que tout se mit en branle.
C’était quelques heures après mon horrible rixe avec Olivier.
Extraits
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