La guerre est-elle un accident des sociétés ou appartient-elle à leur constitution même ? Telle est la question posée par Foucault dans son Cours de 1976 «Il faut défendre la société». Renversant le célèbre aphorisme de Clausewitz sur «la guerre prolongée par la politique», il démontre comment un «dispositif de guerre» s'est introduit dans le discours politique moderne comme «guerre continuée» ou guerre nécessaire à la fois comme guerre des races, lutte des classes, social racisme et racisme d'Etat. Il s'agit aussi de voir pourquoi le discours historique «scientiste» n'a jamais voulu prendre en compte aucun autre point de vue que celui où «le savoir et la vérité ne peuvent pas ne pas appartenir au registre de l'ordre et de la paix, que jamais on ne peut trouver le savoir et la vérité du côté de la violence, du désordre et de la guerre». Au contraire, c'est la vision du monde comme «champ de bataille» dont le discours révolutionnaire autrefois s'enflammait qui sera curieusement reprise de nos jours par les porte-parole néoconservateurs de la «guerre des civilisations». On pourrait croire en lisant ce Cours que l'ennemi secret ou non déclaré de Foucault aurait été Kant ou les Lumières, mais qu'on ne s'y trompe pas, ce qu'il vise ici c'est bien la résurgence d'un racisme qui n'ose dire son nom comme retour d'une nouvelle guerre des races.
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