#Roman francophone

Phèdre

Jean Racine

Ah ! cruel, tu m'as trop entendue ! Je t'en ai dit assez pour te tirer d'erreur. Eh bien ! connais donc Phèdre et toute sa fureur. J'aime. Ne pense pas qu'au moment que je t'aime, Innocente à mes yeux, je m'approuve moi-même, Ni que du fol amour qui trouble ma raison, Ma lâche complaisance ait nourri le poison. Objet infortuné des vengeances célestes, Je m'abhorre encor plus que tu ne me détestes. Les dieux m'en sont témoins, ces dieux qui dans mon flanc Ont allumé le feu fatal à tout mon sang ; Ces dieux qui se sont fait une gloire cruelle De séduire le cœur d'une faible mortelle. C'est peu de t'avoir fui, cruel, je t'ai chassé : J'ai voulu te paraître odieuse, inhumaine, Pour mieux te résister, j'ai cherché ta haine. De quoi m'ont profité mes inutiles soins ? Tu me haïssais plus, je ne t'aimais pas moins. Tes malheurs te prêtaient encor de nouveaux charmes, J'ai langui, j'ai séché, dans les feux, dans les larmes. Il suffit de tes yeux pour t'en persuader, Si tes yeux un moment pouvaient me regarder.

Par Jean Racine
Chez Flammarion

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Editeur

Flammarion

Genre

Littérature française

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Phèdre

Jean Racine

Paru le 01/10/1995

96 pages

Flammarion

2,80 €