#Roman francophone

A cause d'un baiser

Brigitte Kernel

"Elle était si parfaite, comment avais-je pu soudain aimer une autre personne ? Que deux coups de téléphone, un déjeuner, un baiser, un seul baiser et quelques caresses remettent à ce point ma vie, notre vie, en question ? Qu'est-ce qui m'avait pris de dire aussi vite à Léa : j'ai embrassé une autre femme ? La greffe avait pris, en un baiser. Un baiser qui avait duré plus de deux heures et les mains, les doigts de Marie, sous mon pull, sur ma poitrine. Il m'avait semblé que ma vie basculait. Et maintenant comment faire ? Léa, Marie ; Marie, Léa. Peut-on donc l'espace d'un court moment, ou même d'un temps plus long, aimer deux personnes à la fois ?" Après Fais-moi oublier, le nouveau roman d'amour de Brigitte Kernel. Celui d'une femme tiraillée entre Léa, celle qu'elle aime, et l'envoûtante Marie qui, en un baiser, vient tout bouleverser.

Par Brigitte Kernel
Chez Flammarion

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Editeur

Flammarion

Genre

Littérature française

Au début, je m’étais dit que c’était inenvisa- geable, fou et délirant, tromper ma femme, mon essentielle, celle que j’avais eu l’impression de cher- cher toute ma vie et qui avait été si douce, si déli- cate, si prévenante, merveilleuse en somme, durant tant de mois, tant de journées difficiles pendant lesquelles mon père semblait se mourir. Celle qui avait tout entendu, tout vu de ma vie. Celle qui n’avait aucun défaut. Et puis, au bout de trois ans, nous étions encore si unies, ces journées sur ou sous la couette, oui, tout cela nous avait fait penser que nous étions une exception. On dit que le sentiment amoureux dure trois ans, mais non il peut durer toute la vie, nous disions-nous alors que nous venions de faire l’amour et qu’un bain parfumé aux huiles précieuses nous mélangeait.

Elle était si parfaite, comment avais-je pu aimer soudain une autre personne ?

Comment cela avait-il été possible ? Que deux coups de téléphone, un déjeuner, un baiser, un seul baiser et quelques caresses remettent à ce point ma vie, notre vie, en question ?

Qu’est-ce qui m’avait pris de dire aussi vite à Léa : j’ai embrassé une autre femme ? Pourquoi si tôt cet aveu ? Pourquoi ?

La greffe avait pris, en un baiser. Un baiser qui avait duré plus de deux heures et les mains, les doigts de Marie, sous mon pull, sur ma poitrine. Il m’avait semblé que ma vie basculait.

Et maintenant comment faire ?

Mes yeux me brûlaient. J’avais tellement envie de Marie tout à coup. Sa voix, ses rires, sa vivacité, son intelligence, sa finesse, ses cheveux couleur d’ébène rejetés en arrière, son parfum, je n’étais plus que soif, je n’étais plus que faim. Mais, il ne fallait pas, je me le répétais, c’était comme une litanie, je n’ai pas le droit, je n’ai pas le droit, ne pas faire ça à Léa, ne pas faire ça à Léa. Léa, mon amour, ma femme.

Léa, Marie ; Marie, Léa. Peut-on donc l’espace d’un court moment, ou même d’un temps plus long, aimer deux personnes à la fois ?

Dans mon corps, s’écroulaient murs, fondations, toits, populations d’images, de souvenirs, de pro- messes, mais aussi monceau de projets et de certi- tudes. Une vie en éboulis.

J’ai regardé Léa, elle a tourné la tête, là, vers la fenêtre. Elle fixait le dôme du Sacré-Cœur, ses che- veux blonds brillaient dans le reflet du pâle soleil d’hiver, enfin, et – comme le temps me parut long –, elle a laissé son visage revenir vers moi, m’a exami- née comme on dissèque quelque chose que l’on ne connaît pas et qui n’a rien d’humain, j’ai détourné les yeux, je n’oublierai jamais, comment peut-on autant aimer quelqu’un et lui infliger soudain une si intense douleur ?

Elle a murmuré je ne comprends pas. Elle a répété mais pourquoi tu me dis ça, pourquoi tu me dis ça au moment de partir pour l’aéroport ? Et elle s’est tue. Ses doigts s’entortillaient et se tordaient les uns les autres, ses pupilles étaient brillantes, ses mâchoires contractées. Pourquoi, pourquoi ?

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11/01/2012 364 pages 18,00 €
Scannez le code barre 9782081267091
9782081267091
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