#Essais

Carnets de campagne. Dans les coulisses d'Europe Ecologie

Jean-Marie Bouguen

Les coulisses d'une campagne électorale comme si vous y étiez ! Un jeune membre du staff des Verts a tenu son journal durant les neuf mois de la campagne d'Europe Ecologie aux élections régionales, dressant un tableau vivant et fourni de la vie politique au quotidien. Sous la plume de Jean-Marie Bouguen, nous assistons de l'intérieur aux mille et une étapes de la campagne conduite par Cécile Dulot, depuis sa mise en route en juin 2009 jusqu'au dénouement du 21 mars 2010 : la désignation des candidats, le financement des opérations, l'intégration au sein d'Europe Ecologie de membres de la société civile - tel Augustin Legrand, des Enfants de Don Quichotte -, les réunions stratégiques, les débats passionnés, les confrontations avec les citoyens... Dans les couloirs de " la Chocolaterie " (le siège des Verts) comme sur le terrain - cette île-de-France à convaincre du bien-fondé d'une politique régionale verte -, il a tout consigné avec humour, sans révérence ni autocensure. Il nous parle ainsi de politique concrète et nous fait connaître ces gens jamais mis en lumière alors qu'ils jouent un grand rôle dans le succès des têtes d'affiche : les assistants de tout poil et les militants multi-tâches.

Par Jean-Marie Bouguen
Chez Les Petits Matins

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Actualité et médias

Militant du dimanche

7 juin 2009, La Bellevilloise

(20e arrondissement, Paris).

 

Mon nom est Jean-Marie Bouguen.

Je suis adhérent des Verts.

Je bosse pour les Verts.

En somme, je vis – en partie – pour les Verts.

Mais je suis un bien piètre militant de terrain.

Je n’ai jamais collé une affiche, jamais distribué un tract et pas levé le petit doigt pendant la campagne des élections européennes. Aussi, lorsqu’une certaine Marie-Charlotte du comité de campagne d’Europe Écologie m’appelle le 7 juin 2009 et me propose de lui donner un coup de main pour préparer la soirée électorale, je la bénis intérieurement de me fournir la possibilité de me rendre utile au moins une fois quelques heures avant le résultat.

 

À ma décharge, il faut savoir qu’il y a plusieurs façons de militer.

Il y a le militant « de campagne ». Avec cinquante affiches sous un bras, le rouleau à la main et le pot de colle accroché à la bouche, il se lève à quatre heures du matin pour recoller sur les affiches de ses adversaires.

Il y a le militant « activiste ». Il connaît tous les réseaux associatifs, se déguise, « flashmobbe », squatte et lance de grandes opérations de désobéissance civile – ce que l’on commence à appeler les « nouveaux militants ».

Il y a le militant « geek ». Jour et nuit, il bombarde la Toile de messages mais aussi (et surtout) les listes internes du parti, et s’exprime sur tout.

Il y a le militant « d’appareil ». Celui-là connaît les statuts de son parti sur le bout des doigts, et souvent également la carte électorale. Il prend plaisir à faire l’exégèse des derniers sondages ou à supputer telle ou telle arrière-pensée de telle déclaration ou telle décision de justice.

Et puis il y a les militants « de métier » : les collaborateurs d’élus, dont je fais partie. Ils écrivent des discours, pondent des amendements ou des communiqués de presse, et assistent au quotidien les élus. Ce ne sont pas, comme on l’entend souvent, des militants payés, mais des professionnels qui consacrent leur carrière à l’action institutionnelle d’un mouvement. Beaucoup entrent par ailleurs dans une ou plusieurs catégories citées plus haut. Pour ma part, je fais partie de ceux qui, une fois arrivés chez eux, se disent qu’il est bon de faire autre chose, voir d’autres visages, parler d’autres sujets. Reste que j’ai la politique chevillée au corps, et je ne pouvais m’excuser l’oisiveté de ces derniers mois.

 

Pourtant, je sens bien, comme tout le monde, que « quelque chose se passe ». C’est lié à ce nouvel « objet politique non identifié » : Europe Écologie. Avant d’adhérer aux Verts, je rêvais de voir les écologistes de tous bords fédérer leurs forces. J’ai rapidement abandonné cette idée en apprenant, mois après mois, toutes les petites histoires, les tabous de certains courants, les querelles de personnes, les clivages idéologiques. Et me voilà dans cette salle, cerné d’affiches à l’effigie de Daniel Cohn-Bendit, d’Eva Joly et de José Bové. Qui a fait ce rassemblement ? La réponse est simple : tout le monde. C’est le principe du rassemblement, chacun doit y mettre du sien. Il y a une autre réponse possible, plus hasardeuse, mais qui mérite l’étude : Nicolas Sarkozy. Malgré lui, bien sûr. En lançant le Grenelle de l’environnement, il a rassemblé les écologistes de tous les horizons, qui se sont enfin trouvés autour d’une même table. Ils ont appris à travailler ensemble. La dynamique créée par Nicolas Hulot lors de la dernière présidentielle a dû jouer aussi, de même que la création de l’Alliance pour la planète, un collectif d’associations écologistes qui avait évalué la place de la problématique environnementale dans les programmes et les bilans de chaque parti en 2007. Je ne suis pas dans le secret des dieux, mais j’imagine que la direction des Verts, à commencer par leur secrétaire nationale, et les leaders « d’ouverture » n’ont pas dû ménager leurs peines pour parvenir à ce résultat, et peuvent être considérés comme les vrais artisans de ce mouvement. Merci qui ? Je ne suis pas le mieux placé pour répondre à cette question. Toujours est-il qu’aujourd’hui le rassemblement est là. Des Verts, des associatifs, des proches de Hulot, des citoyennes et citoyens. Et ça marche. Depuis quelques jours, les sondages s’emballent. Il en tombe sans cesse et, quasi systématiquement, la liste « Europe Écologie » progresse.

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06/05/2010 189 pages 15,00 €
Scannez le code barre 9782915879711
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