Note préliminaire
Présumé innocent
Lors d’un procès au pénal, la personne mise en accusation, quelle qu’elle soit, doit d’emblée être présumée non coupable avant de pouvoir être condamnée pour crime. Il revient ensuite au ministère public de faire la preuve de sa culpabilité. L’accusé n’a aucune obligation, quant à lui, de prouver qu’il est innocent ou coupable. Si le ministère public ne peut apporter les preuves dignes de foi susceptibles de déterminer la culpabilité pleine et entière de l’accusé, la Cour doit le déclarer non coupable.
En résumé, suspicion ne vaut pas condamnation, et le doute profite à l’accusé.
Chapitre I. Le moine taoïste
Dans l’après-midi du 30 avril 1998, un bus de marque « Feng Tian » circulait sur la route du Nuage noir dans la région touristique de Wuyishan, celle des monts Wuyi ; à son bord, six passagers, trois hommes et trois femmes, tous d’une cinquantaine d’années : au premier rang, un homme du nom de Zhao Menglong, professeur universitaire de droit, avec, à ses côtés, une poétesse jouissant d’une petite renommée, Qian Mingsong ; au second rang, Sun Feihu, sous-chef du département administratif de la Culture, en compagnie de Li Yanmei, spécialiste de la doctrine bouddhiste ; derrière eux, Zhou Chiju, un négociant en pierres précieuses qui se rend souvent aux frontières du Yunnan avec la Birmanie, et Wu Fengzhu, enseignante en esthétique.
Ces six condisciples et amis avaient, dès les grandes vacances de leur première année d’université, fait ensemble une excursion à Wuyishan. Ensuite, la vie les avait séparés, chacun allant son chemin, un chemin semé d’embûches pour certains alors que d’autres avaient eu le vent en poupe ; une vie banale pour les uns, la grande vie pour les autres. Trente années s’étaient écoulées et, au moment de se retrouver, leurs sentiments étaient partagés entre crainte et émotion. Sun Feihu avait épousé Li Yanmei ; Zhou Chiju et Wu Fengzhu étaient également mari et femme ; Zhao Menglong et Qian Mingson pour leur part étaient restés célibataires. L’automne précédent, lors de la réunion des anciens, ils avaient décidé de refaire ensemble le voyage de Wuyishan, à la recherche du temps perdu et de leur jeunesse passée. Mais le temps n’était plus où leurs cœurs battaient à l’unisson.
Wuyishan, ce sont des montagnes couleur de feu et des eaux d’un vert limpide, d’épaisses forêts et des grottes profondes, des fleurs et des herbes d’exception, des oiseaux et autres espèces d’animaux rarissimes. Mais ce qui en fait la renommée, ce sont surtout ses nuages aux mille et une formes, changeants et énigmatiques. Tantôt, on les voit comme une mer ou en forme de dragon ; tantôt, on y voit l’image du Bouddha tel un mirage, un spectre de Brocken ou une lumière céleste ; ou alors, ce sont des spirales de nuées roses ou des bouffées de fumée. Les plus chanceux peuvent se remplir les yeux du spectacle de ces nuages empourprés, rouges, orangés, blancs, gris et noirs qui passent tous ensemble au-dessus des cimes dans le ciel crépusculaire.
Extraits
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