#Essais

Le Rire. Essai sur la signification du comique

Henri Bergson

« Du mécanique plaqué sur du vivant ». Cette formule n’est pas elle-même plaquée mécaniquement par Bergson sur le rire. Bien au contraire, c’est un Bergson à la fois psychologue, sociologue, philosophe de l’art et moraliste qui écrit Le Rire, essai sur la signification du comique, en 1900, au coeur d’une oeuvre dont ce livre est une étape majeure, et d’un moment dont il traverse tous les enjeux. Une diversité infinie donc, mais plus que jamais dans une intuition, dans une écriture d’une simplicité extrême qui en font un chef d’oeuvre unique.

Par Henri Bergson
Chez Presses Universitaires de France - PUF

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Genre

Littérature française

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Faut-il s’en étonner ? Les événements dramatiques et les pleurs semblent s’inscrire dans la trame de l’existence humaine. On en prend acte, sans s’interroger à leur sujet, comme s’il s’agissait d’accidents redoutables mais attendus. En revanche, le rire apparaît inopiné autant qu’irrationnel. À son propos, les philosophes parlent volontiers d’« énigme » ou de « mystère » : il leur pose une difficulté apparemment insoluble.

Souvent programmé dans le cadre des divertissements proposés sur les scènes ou sur les écrans, il survient aussi à l’improviste, à tout moment et à tout propos (également hors de propos) dans la vie quotidienne. En résultent d’étonnants effets physiologiques qui vont des glapissements et des contorsions du visage ou du corps entier aux larmes et aux relâchements viscéraux. Parce que ces phénomènes concernent tout un chacun, les penseurs se sont attachés à en rendre compte dans des « Traités du ris » dont les parutions successives attestent la difficulté de donner une réponse satisfaisante au phénomène. Il revient alors à chaque essayiste ou philosophe de le porter à son crédit et à nouveaux frais, en repartant de zéro, comme si rien n’avait jamais été accompli avant lui. Ce qu’affirme l’un de ceux qui ont cherché à résoudre le problème :

La multitude des disputes qu’a suscitées la matière que je traite, et les erreurs sans nombre où sont tombés les sages mêmes qui l’ont voulu approfondir, nous avertissent qu’il n’est, […] dans ce flux et reflux d’opinions qui se détruisent, qu’une seule boussole à suivre : celle de l’expérience et du sentiment intime.

Lorsque Bergson décide d’aborder à son tour la question, il prend le relais d’innombrables prédécesseurs, le plus souvent oubliés. Dans la génération qui le précède, des jeunes gens ont voulu rompre avec le pessimisme ambiant : au Quartier latin, le groupe des hydropathes ; sur la butte Montmartre, les habitués des cabarets dont ceux du Chat noir, le plus célèbre d’entre eux. Par ailleurs, de nombreuses études, publications ou enquêtes répondent à la demande d’un public impatient d’entrer de plain-pied dans la « Belle Époque ». On mentionnera pour mémoire les études d’Arsène Alexandre (L’Ardu rire et de la caricature), de Marcel Schwob (Le Rire), les interviews de Jules Huret dans Le Figaro (« Le Rire français »), les traductions des contes de Mark Twain en France, des études comme celle de Gabriel de Lautrec sur l’humour, sans oublier de multiples gazettes de divertissement : Le Petit Journal pour rire, Le Journal amusant, Le Sourire, La Vie drôle, etc. – ou encore l’ouvrage de Coquelin cadet, Le Rire, illustré par Sapeck, héritier d’André Gill et « prince des Fumistes », de douze ans antérieur à celui de Bergson. Tous participent au regain d’intérêt d’un pays traumatisé, désireux d’oublier les sombres heures de la défaite de la France du Second Empire au terme de la guerre contre la Prusse en 1870 et de la guerre civile qui a mis fin à la Commune de Paris.

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31/08/2012 359 pages 12,50 €
Scannez le code barre 9782130608226
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