#Roman francophone

Asparagus

Fred Léal

"Les mois passaient à tous ces petits jeux. Les nouvelles de Cayenne étaient de plus en plus alarmantes. Les maladies gagnaient, la mort étendait ses ravages, la panique avait envahi Kourou, Cayenne, les du Salut. Chanvalon, à peine remis de la fièvre jaune, continuait de supplier de ne plus envoyer personne, insistant sur le manque de médicaments et de vivres. Autant en emportait le vent".

Par Fred Léal
Chez P.O.L

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Editeur

P.O.L

Genre

Littérature française

 

Dans Selva !, mon premier bouquin1, j’ai zappé une figure pourtant maîtresse de cette hum… « Odyssée ». Jean-Charles Hérisson. Tout juste si je lui fais traverser le roman sous quelques allusions ou private jokes… Dieu sait qu’il méritait sa place à table ! Mais en rédigeant le livre, je craignais d’instiller trop de recrues civiles – ne jamais abuser des pièces rapportées – parmi les purs et durs d’Active.

 

1. En réalité, mon premier livre, c’est Mismatch.

‒ Non, c’est Grèbe.

(sans compter les Général des Citram…)

On s’en f

J’ai rencontré Jean-Charles, dit Charlie, au mess des officiers de la gendarmerie de Cayenne. Ils offraient un pot pour je ne sais plus quelle fête batave… L’occasion fit les larrons.

Charlie effectuait son service militaire au 9e RIMA, chez les trouducs de l’infanterie de marine. J’ai beau jeu de frimer aujourd’hui. À l’époque de mon intégration, j’aurais bien aimé atterrir dans ce régiment aux hommes réputés débonnaires et fumeurs de chichon. Parcourir le Maroni, serrer des pinces autochtones et me les grâler au mess rempli de victuailles…

Hélas ! Si je n’avais – re-hélas ! – tant déconné à Libourne, dans le sanctuaire de la préparation militaire dévolu aux professionnels de santé. Ah, le bon vieux temps du service obligatoire ! Après un mois de turbin soporifique – au terme d’un concours classant – chaque médecin en herbe y désignait son affectation.

Une, deux ! Une, deux !

Du nerf les toubibs !

Ensuite, un an durant, il se faisait la main sur de pauvres congénères (les appelés) dans un bled lugubre qu’il fallait choisir avec circonspection si on ne voulait pas ajouter trop d’ail à cette vinaigrette.

Ouillouillouille ! Un mois de cours diligentés par d’éminents spécialistes sur le risque chimique ou le descriptif d’une arme à feu, de séances d’ordre serré des plus drôles et de corvées ménagères censées demeurer toute la vie au fond de sa cervelle comme de bons souvenirs…

Loyal ! Réveil !

Un beau lapsus que ma chute sur le parcours de cross. Elle eut l’effet d’annihiler – avant même que les épreuves écrites ne débutent – toute chance de figurer au tableau d’honneur. Comment désormais espérer obtenir un rang qui me permette de glander près de chez moi ? Stupide nid-de-poule ! Je me mis à boiter sous la pluie sans même tenter d’arrêter le flot de sang qui s’épandait de mon genou.… foiré ! En combattant (en un mot) magnifique, je finis par franchir le Rubicon longtemps après tous mes camarades. Seule une famille (certes fournie) de romanichels stationnée aux abords de la ligne d’arrivée m’accorda une (discrète) salve d’applaudissements qui mérita un (petit) salut de la main en retour. Un sbire en survêt réglementaire veillait :

« Eh, petit glandu, tes copains ont commencé à gratter ! »

« Ouais, ouais, me voilà ! »

Je n’avais plus qu’à clopiner en direction du grand bâtiment sans âme de la place d’armes.

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08/11/2013 220 pages 15,00 €
Scannez le code barre 9782818019276
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