Quelque part en Bretagne
Il était une fois, il y a bien longtemps, dédaignés des dieux, quelques clans de chasseurs. Affrontant les vents du froid, les famines répétées, l’appétit d’animaux redoutables, ils s’accrochaient à une terre qui ne voulait plus d’eux.
Dans ce combat pour ne pas être effacé, l’observation, le questionnement, l’esprit de déduction, s’affinèrent. La montée en puissance d’une banque de données devint l’atout de survie.
Sur ce terreau fertile, sans le savoir, certains s’engagèrent sur une piste qui n’avait été qu’effleurée par l’espèce humaine. Ce furent les premiers pas, vacillants, de la culture mère.
Après bien des hivers, un printemps, une pierre s’affranchit d’une motte de terre. Ramassée, elle rejoignit des compagnes captives d’un tiroir de curiosités d’un abri de jardin. Parfois, le geôlier les tournait dans sa main, haussait les épaules et les remettait à l’ombre.
Un jour, un chasseur se réveilla d’un long sommeil de pierre.
Il pointa son fier visage sur la face d’un rognon de silex.
Bien que pétrifié, le gardien ne lâcha pas le fil qui le reliait à un passé qui le dépassait. Avec le temps, une complicité s’instaura. Celui qui ne connaissait pas le débitage levallois, les éclats retouchés, des animaux disparus, découvrit le parcours paléolithique de l’autre.
Le chasseur présenta ses compagnons, des instants de vies, des drames avec, parfois en pointillé, des éléments constitutifs de son imaginaire et de sa culture.
C’était, vers la fin de la terre. Au soleil, courait, déjà capricieux, un petit fleuve. Vers les vents du froid, de hautes herbes l’emportaient sur l’eau salée. Au delà, des glaciers avaient pour ambition de rejoindre les nuages.
C’était, il y a environ deux billions de battements d’un cœur…
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