Le Temps de l'histoire

Philippe Ariès

"Tout en conservant et en perfectionnant son outillage scientifique de recherche, l'Histoire se conçoit comme un dialogue où le présent n'est jamais absent. Elle abandonne cette indifférence que les maîtres d'autrefois s'efforçaient de lui imposer. L'historien d'aujourd'hui reconnaît sans honte qu'il appartient au monde moderne et qu'il travaille à sa manière à répondre aux inquiétudes - qu'il partage - de ses contemporains. Son optique du passé demeure liée à son présent - un présent qui n'est pas seulement une référence de méthode. Désormais, l'Histoire cesse d'être une science sereine et indifférente. Elle s'ouvre au souci contemporain dont elle devient une manière d'être dans le temps de l'homme moderne. A une civilisation qui élimine les différences, l'Histoire doit restituer le sens perdu des particularités". Philippe Ariès. Philippe Ariès (1914-1984) a écrit notamment L'Enfant et la vie familiale sous l'Ancien régime et L'Homme devant la mort.

Par Philippe Ariès
Chez Seuil

0 Réactions | 3 Partages

Editeur

Seuil

Genre

Littérature française

3

Partages

De tous les livres de Philippe Ariès, le Temps de l’Histoire est sans doute le plus méconnu. Jamais réédité depuis sa parution en 1954, épuisé il y a longtemps, il n’était plus accessible qu’en bibliothèque – sauf pour le petit nombre de lecteurs qui avaient acheté, au prix de 600 francs, le livre à couverture blanche ornée d’une déesse grecque publié par les Éditions du Rocher, 28, rue Comte-Félix-Gastaldi à Monaco. Inconnu du large public fidèle, de livre en livre, à l’œuvre d’Ariès, le Temps de l’Histoire a été aussi longtemps oublié par le monde universitaire. Depuis quinze ans, il n’a jamais été cité dans les revues de sciences sociales, françaises ou étrangères, avec deux exceptions toutefois : d’une part, l’article de Fernand Braudel, « Histoire et sciences sociales : la longue durée », paru dans les Annales en 1958, qui mentionne le livre en note et indique que « Philippe Ariès a insisté sur l’importance du dépaysement, de la surprise dans l’explication historique : vous butez, au XVIe siècle, sur une étrangeté, étrangeté pour vous, homme du XXe siècle. Pourquoi cette différence ? Le problème est posé » ; d’autre part, un article publié dans la Revue d’histoire de l’Amérique française par Micheline Johnson qui cite l’ouvrage mais sans y trouver une définition satisfaisante du temps historique : « Philippe Ariès, dans son beau livre le Temps de l’Histoire, décrit l’évolution du sens historique à travers les âges après avoir fait l’analyse du sens historique chez les hommes de sa génération, qu’ils soient de droite (royalistes en France) ou de gauche (historiens marxistes ou marxisants). Mais pour lui le sens historique est un donné, une sorte d’“adhésion au temps” […]. Il n’analyse pas cette attitude : il la constate tout simplement à travers les multiples objets qui la nourrissent. » Même l’essor marqué en ces dernières années de l’histoire de l’Histoire n’a pu faire sortir le livre de l’oubli, et rares sont ses mentions dans les travaux consacrés aux historiens du Moyen Age et du XVIIe siècle, pourtant étudiés dans ses deux chapitres centraux. Les références qui y sont faites par Gabrielle Spiegel, Orest Ranum ou Erica Hart demeurent encore l’exception. Une longue citation, toutefois, en est faite dans la biographie de Jacques Bainville rédigée par William Keylor, qui prend appui sur le témoignage et l’analyse de Philippe Ariès pour comprendre les raisons du succès de l’Histoire de France publiée par Bainville en 1924.

Un livre oublié. Mais un livre qu’il faut maintenant redécouvrir. Lorsqu’il paraît, en 1954, Philippe Ariès a quarante ans. Professionnellement, il dirige le Centre de documentation de l’Institut de recherches sur les fruits et agrumes tropicaux où il était entré en 1943. Il a déjà publié deux textes. En 1943, son essai les Traditions sociales dans les pays de France constituait l’essentiel du premier des Cahiers de la Restauration française édités par les Éditions de la Nouvelle France. La prière d’insérer présente l’auteur comme « un jeune historien, géographe et philosophe qui marquera dans sa génération », et son projet, comme l’étude « de l’origine et de la force des diverses habitudes religieuses, politiques, économiques, sociales ou littéraires qui ont, en s’accumulant, donné à quelques-unes des grandes régions françaises leur caractère propre et à la France tout entière sa structure et son visage ». L’idée maîtresse du livre, telle qu’elle est là résumée, s’accorde d’elle-même avec l’esprit du temps, et avec la francisque que l’éditeur avait cru bon de placer sur la couverture de sa série de cahiers : « Par l’ancienneté et la solidité de ses coutumes, la France possède une puissance de stabilité, une capacité de persévérance qui constituent pour ses enfants un puissant motif de confiance. Allégé de tout souci d’actualité, ce livre n’en contient pas moins une grande leçon d’espérance nationale. »

Commenter ce livre

 

01/02/1986 256 pages 19,30 €
Scannez le code barre 9782020090889
9782020090889
© Notice établie par ORB
plus d'informations