#Essais

La France de la Renaissance

Didier Le Fur

Si l’on vous dit XVIe siècle, vous pensez immédiatement à la Renaissance, à Chambord, et à Léonard de Vinci. Peut-être aussi à Catherine de Médicis, aux guerres de Religion et à Saint- Barthélemy. Mais, que savons-nous sur les origines de la fraise et sur l’invention de la braguette qu’arbore si fièrement François Ier sur ses portraits ? Sur le langage peu châtié et fort imagé qu’on pouvait entendre de la cour à la rue? Sur les massacres de villageois pratiquant le culte vaudois dans le sud de la France ? Sur la légende d’une Anne de Bretagne, reine de France, chaussée de sabots, noble paysanne qui serait restée fière de sa terre et de sa culture ? Sur les origines de la cédille et sur les différents traitements inventés pour combattre une nouvelle maladie : la syphilis. Enfin, comment un animal aussi ridicule que le coq a-t-il été préféré à tous les autres pour servir de faire-valoir à une nation ? En abordant le XVIe siècle par des entrées aussi variées qu’inattendues, mêlant le culturel, le militaire, le politique et le religieux, dosant savamment l’anecdote croustillante, les événements majeurs et la recherche historiographique la plus pointue, ce Dictionnaire de curiosités nous offre un kaléidoscope haut en couleur, qui restitue la complexité et la richesse d’une époque majeure de l’histoire de France. Didier Le Fur vous invite à partager avec lui une balade. Une balade qui n’omet bien entendu pas les moments et les personnages historiques majeurs, mais qui donnera toujours la préférence aux chemins buissonniers, légers, drôles, insolites et surprenants.

Par Didier Le Fur
Chez Editions Tallandier

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Genre

Histoire de France

 

 

 

 

INTRODUCTION

 

 

C’est par une image éclatante que l’on nous présente volontiers la Renaissance en France. Il s’agirait d’un moment historique majeur qui annoncerait, par ses innovations, le temps glorieux des Lumières. Une conception qui en ferait l’aube de l’époque moderne, le brouillon de notre modernité. Évidemment, il y eut des guerres, évidemment, l’on s’était battu au nom de Dieu entre Français. Mais tout cela est vite oublié, tant les nouveautés apportées à notre civilisation seraient décisives et fondatrices. Suivant la définition de Pétrarque, on nous affirme que la Renaissance serait le début de la reconquête sur l’obscurantisme, temps de ténèbres dominé par un imaginaire chrétien rétrograde, par des croyances et des superstitions absurdes, un isolement intellectuel mesquin. Première remise en question d’un système injuste et obsolète, elle serait à l’origine d’une nouvelle sagesse, essentiellement laïque et humaine, caractérisée par l’individualisme. Depuis quelques années, contexte international oblige, on prétend même qu’elle serait, du fait de la découverte du continent américain et de son exploitation, la première mondialisation. En somme, la Renaissance serait une véritable révolution. Pour illustrer ce point de vue, sont évoqués les grands voyages à travers le monde, l’imprimerie, le génie de certains artistes, tels que Léonard de Vinci, les travaux d’intellectuels, comme ceux de Budé et d’Érasme. Un ensemble de talents pas toujours français, mais qui aurait été accueilli et soutenu en France par un prince, François Ier, devenu l’incarnation de cette époque si magnifique.

À ce souvenir radieux, d’autres ont émis de sérieuses réserves. La Renaissance du XVIe siècle aurait été un crime. L’imitation italienne de l’exemple antique aurait abouti à une oppression du génie national et à la fabrication d’œuvres artificielles. En outre, certains historiens du Moyen Âge, depuis quelques années, soutiennent que la Renaissance ne serait pas née au XVIe siècle, mais au XIIe, voire au IXe, sous Charlemagne. Le renouveau de la France serait le temps de l’empereur à la barbe fleurie ou celui des cathédrales, mais certainement pas celui des châteaux de la Loire qui, loin d’être novateur, n’aurait été que la manifestation d’un déclin. Les plus modérés se contentant de dire : dans la Renaissance, ce qui est nouveau est mauvais et ce qui est bon n’est pas nouveau.

Au péché d’éblouissement, il n’est pas forcément utile d’opposer le péché de myopie, d’autant que ce débat n’est pas vraiment récent. Au XVIe siècle, le mot de renaissance n’était attaché qu’à la notion de restauration de disciplines. Celle des arts, suivant l’Italien Giorgio Vasari, et celle des lettres, conception authentiquement française. D’autre part, les hommes qui, en France, voulurent justifier cette renaissance au XVIe siècle furent souvent proches de la foi protestante. Le réveil des lettres, le retour aux textes primitifs auraient, selon eux, amorcé celui de la pure religion. Imprégnés de l’idéologie du temps qui prônait la restauration impériale et qu’ils servirent par leurs écrits, ces hommes affirmaient que, souvent depuis la chute de l’Empire romain, le monde politique, intellectuel et religieux s’était engagé dans une décadence continue qui aurait duré mille ans. Mille ans de nuit d’un Occident livré à la barbarie, jusqu’à ce que Pétrarque et ses acolytes viennent en sonner le glas. Puisque tous s’étaient persuadés que la France serait ce nouvel empire, le dernier annoncé par les prophéties bibliques avant l’avènement de l’âge d’or et le retour du Christ, ces auteurs eurent la prétention de croire qu’après l’Égypte, la Grèce et l’Italie, la France serait également, et par eux, le nouveau centre culturel du monde. Oui, les Grecs et les Romains étaient leurs modèles, mais ils n’étaient pas moindres que leurs prédécesseurs et il était de leur droit, voire de leur devoir, de les surpasser. Oui, les Italiens les avaient devancés sur la voie de la reconquête du monde antique, mais c’était à eux de la poursuivre et de la mener à la magnificence. D’autre part, s’il leur paraissait indispensable de connaître le grec et le latin, il leur paraissait tout aussi indispensable d’écrire désormais leurs œuvres en français, qu’ils souhaitaient réformer et enrichir de nouveaux mots, pour en faire la plus belle langue du monde, et la plus aboutie.

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20/10/2011 264 pages 17,90 €
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