#Roman étranger

Les carnets secrets de Li Yu. Au gré d'humeurs oisives

Yu Li

Voici un ivre sur art et a manière d'être heureux, écrit par un des génies littéraires les plus imaginatifs et fantasques que la Chine ait produits : Li Yu (1611-1679) a rédigé sa vie durant, et d'abord pour lui-même, ces Carnets secrets, feu d'artifice d'inventions et de recettes pour transformer le quotidien et le banal en permanentes et divertissantes créations et récréations. Qu'il s'agisse du charme des femmes, de l'aménagement des jardins ou des maisons, de la philosophie de l'ameublement, de la cuisson du riz, du bon balayage, mais aussi bien des plaisirs charnels ou de la contemplation nocturne des prunus en fleurs, sans parler de la méthode pour bannir les maladies, pour être heureux si l'on est pauvre, et même si l'on est riche, ou de trouvailles pratiques comme le fauteuil chauffant, le tabouret de fraîcheur, l'alcôve parfumée ou les fenêtres-tableaux, son esprit agile et ingénieux lui fait sans cesse expérimenter de nouvelles façons de vivre le plus agréablement possible le bref temps que nous passons sur terre. Ses trouvailles transmuent les insipides routines et habitudes de l'existence en une suite d'intermèdes délicieux ou poétiques, parfois inoubliables, et ce livre sans égal, qui nous révèle les occupations, les joies et les bonheurs d'un monde disparu, peut encore aujourd'hui inspirer notre mode de vie.

Par Yu Li
Chez Philippe Picquier

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Auteur

Yu Li

Genre

Littérature étrangère

 

 

 

 

LI YU, UN GÉNIE

AU PARCOURS FANTASQUE

 

 

Excellent est celui qui ne compte que sur sa nature originelle et ses dispositions innées.

 

Zhuangzi, VIII

 

Etre philosophe… c’est résoudre certains des problèmes de la vie non seulement théoriquement, mais pratiquement… Le philosophe est en avance sur son temps, même dans la forme extérieure de sa vie. Il n’est ni nourri, ni abrité, ni vêtu, ni chauffé comme ses contemporains.

 

Thoreau, Walden

 

Li Yu, un des plus joyeux génies et un des plus charmants excentriques que la Chine ait produits, un écrivain qui fut avec autant de bonheur dramaturge, romancier et nouvelliste, poète et essayiste, naît en 1611 sur la rive nord du bas Yangzi, à Rugao, au Jiangsu ; il est issu d’une lignée anciennement établie à Lanqi, à quelque 150 kilomètres au sud de Hangzhou, au Zhejiang.

Comme tout rejeton de famille lettrée, il doit se consacrer à de longues études avant d’affronter les examens ; en 1635, il a vingt-quatre ans, le voici « talent distingué », c’est-à-dire diplômé du premier degré des examens officiels, ce qui lui ouvre la voie, longue, fort ardue et hasardeuse, des concours provinciaux puis métropolitains. Comme il n’a encore ni trouvé sa vocation véritable ni pris pleinement conscience de ses dons, qui ne sont pas seulement littéraires, il met pour le moment toute son énergie à la préparation de cette course d’obstacles à l’issue de laquelle, dans le meilleur des cas et au prix d’un travail exténuant, on obtient le titre très convoité de « docteur » ; on peut alors être nommé à un poste de sous-préfet et entamer une traditionnelle carrière de « mandarin », de lettré-fonctionnaire ; si la fonction jouit d’un prestige certain, elle est très accaparante, chichement rétribuée, et peut d’ailleurs s’interrompre brutalement à la suite d’une disgrâce, d’une erreur judiciaire, de l’intrigue d’un collègue ou du caprice d’un supérieur…

Ces vicissitudes monotones que connurent tant de lettrés, un destin miséricordieux va, par de subtils subterfuges, les épargner à Li Yu. Il est d’abord recalé plusieurs années de suite aux examens provinciaux ; survient alors une terrible tourmente politique et sociale, l’effondrement de la dynastie Ming et l’arrivée au pouvoir des conquérants mandchous, qui fondent en 1644 la dynastie Qing.

A la faveur de ces échecs et de ces événements imprévus, Li Yu fait le choix d’une autre vie, originale, marginale, digne de lui et de ses talents. Il décide d’abord, ce qui est grave pour un lettré, de renoncer au harnais des charges officielles et de laisser à d’autres le bachotage frénétique et les dissertations aux figures imposées qui, la malchance aidant, peuvent aussi bien mener doucement à la démence, puisque l’on a vu des candidats malheureux s’acharner vainement jusqu’à quatre-vingts ans !

Le voici libre, presque trop ; il sait qu’il n’aura jamais, comme on dit, le « bol à riz en fer » d’un emploi stable, mais il respire mieux. Reste à trouver comment subsister. Son parti est promptement pris, car son instinct d’écrivain, infaillible boussole, depuis longtemps déjà le guide ; cette fois, il lui murmure que son imagination et son pinceau le feront vivre, à condition qu’il ait le courage d’en assumer les risques.

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trad. Jacques Dars
16/10/2009 335 pages 18,80 €
Scannez le code barre 9782809701395
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