Préface à la nouvelle édition
Bernard Golse [*]
Je suis heureux d’avoir été sollicité pour rédiger la préface de la réédition de cet ouvrage, et ceci pour deux raisons principales.
D’une part, parce que cette réflexion approfondie sur la pratique de l’annonce d’une anomalie, d’une malformation ou d’une maladie du fœtus n’a pas pris une seule ride, et parce qu’elle continue, à mes yeux, à être fort précieuse pour toutes les équipes impliquées dans le champ de la périnatalité en leur offrant une mine d’informations et d’incitations à la pensée dans un domaine où la douleur des faits humains concernés fait courir le risque, précisément, d’un empêchement de la pensée.
D’autre part, parce cette situation échographique prénatale m’apparaît, en réalité, comme paradigmatique de la question générale de l’annonce au sein de toutes les disciplines médicales (médicales, chirurgicales, obstétricales et psychiatriques), et c’est sur ce deuxième point que j’aimerais, ici, me pencher plus particulièrement.
Il importe cependant de rappeler, tout d’abord, que l’échographie prénatale fait partie des éléments qui concourent indéniablement à une certaine médicalisation de la grossesse avec le risque corollaire de transformer celle-ci en « maladie », alors même que, fort heureusement, l’immense majorité des échographies offre en fait aux parents l’occasion d’une rencontre visuelle prénatale avec un fœtus en bonne santé.
Le risque d’une rencontre avec un fœtus malade rend ainsi difficile de conserver, à toutes les échographies normales, une fonction de première rencontre créative avec le futur-bébé-encore-fœtus, rencontre qui se situe pourtant au cœur même de cette « relation d’objet virtuel(le) » si bien décrite dans d’autres travaux par S. Missonnier, et qui se devrait, autant que possible, de pouvoir représenter l’un des premiers temps d’une dynamique heureuse d’accès à la parentalité.
C’est donc tout l’art de l’échographiste que de parvenir à faire en sorte que la pesée d’un risque faible ne vienne pas entraver la dimension potentiellement structurante du plus grand nombre des échographies potentiellement susceptibles d’alimenter une capacité de rêverie parentale positive.
Mais la réflexion va plus loin.
La médecine est devenue aujourd’hui une praxis d’orientation scientifique, et la formation des futurs médecins s’avère désormais centrée sur l’acquisition d’un savoir biotechnologique hautement complexe dont l’intériorisation lente et difficile, laisse objectivement peu de place et peu de temps à la sensibilisation des étudiants aux aspects humains délicats de la relation médecin-patient dont on sait pourtant que la qualité conditionne, en partie, l’efficacité des mesures thérapeutiques.
De ce fait, chacun sait que certains médecins possèdent désormais une compétence scientifique impressionnante qui n’empêche, parfois, en rien une certaine maladresse relationnelle… tout aussi impressionnante ! Le public s’en offusque de plus en plus souvent, à juste titre quand, par exemple, l’annonce d’un cancer ou d’une maladie grave se fait entre deux portes ou par téléphone.
Extraits
Commenter ce livre