#Polar

Défoncé

Mark Haskell Smith

Miro Basinas, passionné de botanique, cultive ses plants avec amour. Il ne s'agit ni de fleurs ni de fruits et légumes, mais de marijuana. Comme c'est un artisan doué et consciencieux, il remporte la prestigieuse Cannabis Cup d'Amsterdam, une véritable consécration qui doit lui ouvrir les portes de la gloire. Dès lors, tout ce que l'univers compte de plus défoncé se met en quête de son " produit ". Gangsters, mormons, belle Portugaise enceinte, hommes d'affaires douteux : tous n'ont plus d'yeux que pour Miro. Et bien sûr, les ennuis commencent...

Par Mark Haskell Smith
Chez Rivages

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Editeur

Rivages

Genre

Policiers

 

 

 

 

 

 

 

1

 

 

Une balle peut vraiment foutre votre journée en l’air.

Il sortit de sa maison et pénétra dans le halo de chaleur incandescente. La balle fusa du canon d’un pistolet, jaillit par la vitre ouverte d’un SUV, brûla un trou noir aux contours parfaits dans sa veste (celle qu’il avait achetée dans la friperie de Sunset Boulevard, avec le mot Tigers en lettres orange éclatantes), puis déchiqueta sa chair et enfonça des particules de T-shirt dans sa poitrine. Le projectile lui traversa le corps et perfora son poumon droit, puis le métal ramolli se dilata en carbonisant les tissus de sa poitrine et lui brisa deux côtes en sortant. La balle qui faillit le tuer, les cent vingt petites billes de plomb qui ruinèrent sa journée.

La balle ne s’arrêta pas à ses côtes brisées. Une fois propulsée à l’extérieur de son corps, elle perça un trou de l’autre côté de sa veste, puis poursuivit sa route le long de Perlita Avenue avant de s’encastrer bruyamment dans le flanc d’un van blanc et orange où étaient inscrits les mots GEORGE BAZIL PLOMBIER & ÉLECTRICIEN. Le conducteur crut que quelqu’un venait de lui jeter une pierre.

Miro cligna des yeux. Le monde lui apparaissait de travers. Son visage reposait sur l’herbe tendre, quelque chose de chaud et d’humide coulait sur son corps. Et la douleur laissée par ce bout de métal brûlant était si violente qu’il ne sentait quasiment plus rien. Peut-être était-il en état de choc ?

Des gens hurlaient, l’écho d’une sirène résonnait au loin, mais il ne pouvait bouger d’un pouce. Il n’en avait pas la force.

Le chien de son voisin, un vieux pékinois galeux au corps grêlé de croûtes laissées par d’incessants coups de dents sur sa peau victime d’eczéma, avança vers lui et se mit à grogner. Miro cligna des yeux. Le chien bondit soudainement pour lui mordre le bras, forçant sa première pensée cohérente depuis le flash de lumière blanche.

Ce putain de clébard vient de me mordre.

Il essaya de le dire aux ambulanciers. Les pompiers de Los Angeles le retournèrent sur le dos en murmurant leur jargon médical, puis prirent ses constantes avant de lui enfoncer des aiguilles dans les bras et des tubes dans la gorge.

« Une morsure de chien est le dernier de vos soucis, monsieur. »

La femme l’avait appelé « monsieur ». Comme s’il était vieux.

Miro cligna des yeux. Ses voisins étaient rassemblés de l’autre côté de la rue. Il entendit la vieille Philippine fouineuse de la maison d’à côté.

« Il était en train de mijoter quelque chose. Ça, je m’en doutais. »

Ce putain de clébard m’a mordu.

L’un des ambulanciers injecta quelque chose dans le tube relié à son bras.

« Essayez de vous détendre. »

Miro ne se sentait pas particulièrement tendu, mais il hocha la tête ; il allait suivre son conseil. Il allait tout faire pour essayer de se détendre.

Un Asiatique au crâne rasé, massif et moustachu, se pencha au-dessus de lui. Un insigne de la police de Los Angeles pendait au bout d’une chaîne à son cou. Sa chemise bariolée était constellée de petits motifs de palmiers, de torches et du célèbre Duke Kahanamoku surfant sur la plage de Waikiki.

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trad. Julien Guérif
29/05/2013 331 pages 21,50 €
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