#Polar

Le printemps de Tbilissi

Gérard de Villiers

Levan Arevadzé n'attachait pas une importance extraordinaire à la " parole ". Cette fois, il était beaucoup plus calme.
- Vous serez venu pour rien ! lança-t-il. Ne me prenez pas pour un con ! Votre mec, je le sèche, maintenant. Vous allez l'entendre en direct.
Tenant toujours le portable dans la main gauche, il s'approcha de Malko, posa le canon du Makarov sur son front, releva le chien et lança :
- Ça va faire boum, enculé !
Malko ferma les yeux. Il allait mourir.

Par Gérard de Villiers
Chez Gérard de Villiers

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Policiers

PROLOGUE

 

Une des sentinelles en faction devant la grille du Palais présidentiel d’Avlabari, longue bâtisse blanche plutôt laide, érigée, au cœur du quartier arménien dont les vieilles demeures, pour la plupart inhabitées, tombaient en ruines, sur un promontoire dominant la ville de Tbilissi et la Koura, souleva légèrement son casque pour s’essuyer le front.

Ce 7 août 2008, il faisait une chaleur de bête en Géorgie. Presque 40 °C, même à six heures du soir.

Le soldat se dit avec amertume que le milliard de dollars du budget de la Défense géorgien — le quart du budget total — n’avait pas permis d’acheter pour l’armée géorgienne un équipement plus adapté à la chaleur. Par contre, tous les officiers roulaient dans des gros 4×4 japonais ou coréens et arboraient des uniformes flambant neufs.

Ex-satellite de l’Union soviétique, devenu indépendant le 9 avril 1991, la Géorgie avait connu une jeunesse difficile, devant faire face aux velléités d’indépendance de deux provinces, l’Abkhazie à l’ouest, et l’Ossétie du Sud, au nord. Cette dernière avait réclamé son indépendance le 28 novembre 1991, suivie de l’Abkhazie en juillet 1992.

À la suite de ces remous, le président Gamsakhourdia avait été proprement suicidé, et, en 1995, un vieil apparatchik géorgien, Édouard Chevardnadze, ex-ministre des Affaires étrangères de l’URSS, avait été élu président, puis réélu en 2000.

Cette période s’était caractérisée par une corruption effrénée et une régression économique épouvantable. À Tbilissi, il n’y avait même plus d’éclairage public !

Puis le « chevalier blanc » Mikhaïl Saakachvili était arrivé ! Après avoir chassé Chevardnadze, le nouvel homme fort de la Géorgie s’était emparé du pouvoir le 4 janvier 2004, élu président à 36 ans !

De ce jour, la Géorgie avait pris un virage à 180 degrés, se tournant résolument vers l’Ouest et les États-Unis. Mikhaïl Saakachvili et son équipe, tous de sa génération, avaient été formés outre-Atlantique et vénéraient l’Amérique.

À tel point que les mauvaises langues prétendaient qu’il suffisait d’avoir passé un week-end à New York pour être nommé ministre... Le nouveau président avait acheté des drones aux Israéliens, des chars T72 et T55 à la Biélorussie, et porté le budget de la Défense à 25 % des dépenses de l’État. Il embrassait ouvertement George Bush sur la bouche, baptisait l’autoroute reliant le nouvel aéroport international à Tbilissi Boulevard George W. Bush et accueillait ce dernier en juillet 2005, pour une visite officielle en Géorgie, ex-confetti de l’Union soviétique désormais promue à la pointe du combat pour les libertés...

Encouragé par ce soutien puissant, mais un peu trop voyant, Mikhaïl Saakachvili avait fait le vœu de récupérer l’Abkhazie et l’Ossétie du Sud, retournées dans le giron russe.

D’où le flot de conseillers militaires américains et israéliens et le « réarmement » de la minuscule république de 4 650 000 habitants, grande comme cinq départements français : 70 000 kilomètres carrés. Évidemment, à cette échelle, même l’Ossétie du Sud avec ses 3 900 kilomètres carrés représentait une perte importante.

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21/05/2015 308 pages 7,95 €
Scannez le code barre 9782360534883
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