Éros
— Alors, tu les as revus ce weekend ? a demandé Nayla.
— Ouais…, lui ai-je répondu mollement.
— Allez, raconte !
— Y a rien à dire… Mon père est amoureux, il rayonne. Voilà.
— Et toi ? a insisté Nayla.
— Je ne sais pas. Inès est sympa ; elle est drôle, douce, et elle nous fait du bien. Tu verrais Jason, il est tellement content !
— Et… Marin ?
— Il me saoule. Parce qu’il a un an de plus que moi, il s’y croit. Ce qui m’énerve, c’est qu’il faudrait que j’accepte tout et je n’en ai pas envie, ai-je rétorqué, agacée.
— Que t’acceptes quoi ?
— Oh, ça va avec tes questions !
— S’cuse…
— Je suis désolée, Nayla. J’ai la trouille, je crois. On était bien tous les quatre, on avait notre rythme, notre vie et bam ! Tout change depuis quelques mois. J’en ai marre… Pourquoi je ne peux pas être comme tout le monde ?
— T’exagères pas un peu ? Ça veut dire quoi « être comme tout le monde » ? T’as perdu ta mère, OK, et aujourd’hui ton père est amoureux et heureux… Ça ne fait pas de toi quelqu’un de très très différent. Regarde moi, regarde Thibault ! On n’est pas non plus des modèles, on n’a pas vraiment des familles lisses.
— …
— C’est une chance que ton père soit amoureux, c’est une vraie chance qu’ils se soient rencontrés, a conclu Nayla.
— Oui, mais je n’ai pas envie que les choses changent, je n’ai pas envie que l’on vive tous ensemble. C’est bien comme ça, de se voir et de rentrer chacun chez soi. Je ne veux pas vivre avec Marin et Mina…
— Ah, c’est ça qui t’embête…
— Oui, forcément, à un moment ou à un autre, c’est ce qui va arriver. Depuis des mois, on passe de plus en plus de temps avec eux. Mon père n’arrête pas de me parler de tout ce qui ne va pas changer, de tout ce que cela nous apportera. Pénélope est super contente de voir Mina tous les jours, et Jason répète sans arrêt que c’est génial d’avoir un grand frère… Tu parles d’une chance !
— Salut les filles, vous en faites une tête ! Quelqu’un est mort ? a lancé Thibault en jetant son sac à ses pieds.
— Cléo se fait du souci, a coupé Nayla en fronçant les sourcils. T’as un humour, j’te jure…
— Qu’est-ce qui se passe encore ? C’est toujours le même sujet que celui d’hier et que celui de demain ? a-t-il repris.
— Ouais, ai-je répondu.
— Écoute, je vais juste te dire un truc, et je ne te le répèterai pas. T’as de la chance, et tu ne t’en rends pas compte. T’as de la chance parce que tu as une famille unie, un père très chouette et des frères et sœurs géniaux ; parce que toi, quand tu rentres le soir, tu as quelqu’un à qui parler et des personnes qui s’intéressent à ta vie. Et même si ta mère est morte, tes parents se sont aimés ; si ton père a décidé d’aller de l’avant et de ne pas rester dans le souvenir, c’est bien ! Il refait sa vie et comme vous faites partie de la sienne, il vous embarque avec lui. Je ne dis pas que c’est facile, je ne dis pas que tout sera simple. Depuis que tu as rencontré la meuf de ton père, tu nous dis qu’elle est sympa. Oui, c’est sûr, ça va être différent, mais je pense vraiment que t’as de la chance, parce qu’au moins toi, tu as des personnes sur qui compter. Et ça, a ajouté Thibault les yeux brillants, je t’assure que c’est important.
Extraits
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