Guaporé - Journal de bord d’une pirogue

José Castan

En cette fin 1967, ses études de médecine terminée, Paul part soigner les lépreux durant l'année sabbatique qu'il s'octroie. Engagé à Paris par le père Sylvain, il part rejoindre la mission au Brésil en descendant le fleuve Guaporé. C'est par ces eaux au 17e siècle que les portugais faisaient transiter l'or trouvé en forêt. Sur ces rives il découvre ports et fortins en ruine qui avaient été construit pour sécuriser les convois du précieux métal. Ces pierres taillées sont autant de repères du grand jeu de piste que Paul s'est fixé. Cependant parti en période d'étiage, sa pirogue va s'égarer dans ce labyrinthe fait d'arbres et de marécages. Il se croit dès lors perdu à tout jamais. Arrivant à point nommé, les grandes pluies de l'hiver apportent le courant salvateur. Cette forêt enchanteresse n'aura pas eu le temps de l'avaler tout à fait. Au cours de son périple dans ce milieux hostile il fera des rencontres extraordinaires. En survivant dans cet autre monde, il finit par être séduit par la beauté des lieux et la gentillesse des gens qu'il côtoie. Plus surprenant encore, il fait cette rencontre improbable d'où naîtra l'intrigue qui changera le cours de sa vie. Ira-t-il jusqu'à choisir de se faire indien ?

Par José Castan
Chez Les Editions du Net

0 Réactions |

Genre

Littérature française

Les prémices

Mon père m’a toujours dit : « Il faut apprendre à se faire homme, trouver sa voie ». « Réussir » était son maître mot.

Donc, après avoir fait médecine et prêté le serment d’Hippocrate il ne me restait plus, au terme des études qu’il m’avait payées, que ouvrir un cabinet, me marier, avoir des enfants, faire carrière comme l’on dit. J’allais donc passer ma vie à travailler la semaine avec bien sûr un repos dominical, en famille.

Tous ces « calculs domestiques » ne m’intéressaient pas. Est-ce être un fils indigne que de raisonner différemment, s’opposer à son père ?

Mon père disait aussi, faisant référence à sa période militaire, que pour devenir un homme, il fallait passer la nuit dans les bois, les pieds dans l’eau et dans la boue.

Eh bien voilà, monsieur mon père, aujourd’hui ton vœu est exaucé. En Amazonie, je vais devenir un vrai homme. Certes toi, après de brillantes études, tu avais fait la guerre, avais été fait prisonnier durant quatre années. De ce fait toute ma petite enfance je ne fus entouré que de femmes, tes sœurs, ma mère qui me gardait au moindre rhume sous son aile.

Enfant sage, dès que je sus lire, je fus intéressé par les contes, les légendes, les récits d’explorateurs. Adolescent j’avais récupéré une vieille malle au grenier de mon grand-père que je garnissais au fil des jours de choses que j’emporterai bien sûr le moment venu. J’avais déjà une attirance toute particulière pour ces verts territoires inexplorés d’Amazonie, ces immenses rivières dont je pensais que personne n’avait remonté le cours ni osé rencontrer ces habitants de la forêt aux mœurs bien différentes.

Voyant mon intérêt pour cette connaissance du monde, mon père m’accompagnait dans les musées comme le Musée de l’Homme au Trocadéro à Paris.

Lorsque je prétendais devenir explorateur, alors là ça n’allait plus. Il s’indignait : « Mon petit Paul, c’est pas un métier ça ! Tu vois Jules Verne l’a bien compris. Tout ce que tu as lu de lui, il l’a écrit dans son salon, sans jamais sortir de chez lui ».

Peine perdue que ses mises en garde ! Je continuais à rêver à ma grande aventure fréquentant expositions et conférences pour mieux appréhender cet autre monde. J’en connaissais déjà plusieurs facettes tels ces arcs en bois de fer, ces flèches en os, ces calebasses qui servaient à conserver le curare ou à boire et à manger. Dans une hutte de palme reconstituée grandeur nature, j’avais même vu un chaman en cire soigner un malade avec ses colliers de graines odoriférantes.

Alors à quoi bon aller chercher là-bas, comme le disait mon père, ce qui m’était offert dans les vitrines des musées ? Simplement je poursuivais mon rêve d’enfant contre vents et marées. Et puis, je voulais être maître de ma destinée, la contrôler.

Grand-père qui ne mâchait pas ses mots me le disait :

– Moi j’ai toujours considéré qu’il y a deux sortes d’hommes, ceux qui commandent et ceux qui obéissent. Pour ma part, sans toutefois refuser ou mépriser les lois, je suis resté en marge de la société, j’ai dissimulé ma vie. D’ailleurs, ton père m’a toujours traité de vieil anar… Il n’a pas tout à fait tort.

Commenter ce livre

 

24/10/2017 294 pages 19,00 €
Scannez le code barre 9782312055183
9782312055183
© Notice établie par ORB
plus d'informations