À Wiesbaden en 1961, le quatrième tome de la saga Café Engel d’Anne Jacobs met en scène les derniers frissons d’une prospérité tranquille, bousculée par les tensions générationnelles et l’irruption d’un monde moderne.
Dans Un vent de renouveau, Anne Jacobs poursuit sa fresque familiale autour du Café Engel, petit bastion de tradition niché dans une ville allemande en mutation. Loin de céder aux simplifications mélodramatiques, elle y tisse le portrait d’un quotidien apparemment banal, qu’elle ausculte à la loupe jusqu’à en révéler les failles et les tensions souterraines.
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C’est un été caniculaire, celui de 1961, et l’Europe d’après-guerre semble sur le point de basculer dans une autre époque. La construction du mur de Berlin surgit en arrière-plan, mais c’est au sein du microcosme du Café Engel que se jouent les véritables fissures.
Jacobs déploie avec minutie les contrariétés d’Else, matriarche grinçante dont l’agacement dissimule la crainte d’être mise à l’écart. Face à elle, sa fille Hilde s’épuise à vouloir plaire et maintenir l’ordre d’un monde qu’elle sent vaciller.
Sans effet de manche ni grands rebondissements, le roman capte l’essoufflement d’un modèle familial et social. Il y a dans cette écriture une conscience aiguë de la valeur des gestes simples, du poids des obligations domestiques, et de l’ambivalence des renoncements.
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Les chapitres centrés sur Luisa, belle-sœur de Hilde, traduisent cette lente dépossession que vivent les femmes de l’époque : entre la fierté du travail bien fait, l’aspiration à l’émancipation, et les limites financières, tout se joue à l’échelle du linge à essorer, du jardin à cultiver, du ragoût à préparer.
Jacobs ne cherche pas à plaire. Elle creuse, patiemment, l’épaisseur des jours, leur douce mélancolie, leurs conflits latents. Il faut accepter ce rythme lent, sans éclat, pour y déceler la grâce ténue d’un monde qui s’éteint avec dignité.