Le Fonds mondial pour la nature, mieux connu sous le signe WWF, s'intéresse une fois de plus à l'édition et publie un rapport intitulé « Vers une économie plus circulaire dans le livre ? ». L'étude propose des pistes pour « mieux valoriser le papier des livres, en leur offrant une seconde vie en tant que livre avant d'être recyclés, lorsque cela est nécessaire ».
Le 25/10/2019 à 11:14 par Antoine Oury
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Publié le :
25/10/2019 à 11:14
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La fin de vie du livre semble un sujet toujours tabou, en 2019 : les chiffres et les lieux mêmes où l'on accomplit le pilonnage restent bien dissimulés par les acteurs de l'édition. « 25 % des livres invendus de l’année sont pilonnés ou stockés (131 millions de livres) », avance le WWF dans son étude, assurant par ailleurs que, pour les livres lus et usagés, l'absence de consigne de tri claire reste dommageable.
D'après les données collectées par le WWF, « 30 % à 70 % des livres [pilonnés] pourraient servir à refaire du papier graphique, le reste servant à fabriquer d’autres produits à base de fibres, comme des boîtes à chaussures, des essuie-tout ou encore du papier hygiénique ».
Ces ouvrages en fin de vie, chez les particuliers, revendeurs, bibliothèque, écoles et issus du pilon, représentent entre 107.000 et 233.000 tonnes de livres par an, parmi lesquels entre 98.000 et 170.000 tonnes par an sont recyclées. D'après le WWF, « une partie du gisement possible » pour la fabrication de papier recyclé est gaspillé, puisque seules 30.000 tonnes de livres usagés sont utilisées à cette fin.
D'après le rapport, le livre pèserait pour 9700 à 63.000 tonnes par an dans les ordures ménagères en France (estimées à 30 millions de tonnes par an), un volume écarté, donc, de la filière du recyclage.
Enfin, le WWF déplore le faible usage du papier recyclé dans la conception du livre, qui « a toujours mauvaise presse chez les éditeurs français » : en 2016, 2 % du papier consommé par les maisons d'édition est recyclé. Selon le Syndicat national de l'édition, ce faible pourcentage s'explique par une « offre en papier recyclé [qui] ne répond pas aujourd’hui suffisamment aux besoins des éditeurs en termes de quantités, caractéristiques, formats et prix pour les tirages importants ».
Insuffler une logique d'économie circulaire dans l'édition de livres constituerait, pour le WWF, « un modèle plus vertueux » que le statu quo et le maintien de pratiques traditionnelles. L'ONG propose avant tout aux éditeurs de s'impliquer dans une communication plus claire sur les pratiques environnementales, d'une part, mais avant tout sur les consignes de tri et l'avenir du livre en fin de vie.
Évidemment, la réduction de la production à tout crin et des volumes d'invendus constitue une mesure indispensable, pour « diviser par deux les invendus en 2025 » : dans un secteur où la surproduction — ne serait-ce qu'en volume — est connue et reconnue, tant par les libraires que par les éditeurs, il serait temps de s'y attaquer sérieusement.
Le WWF, dans ses recommandations, remet sur le tapis un point longuement discuté et toujours rejeté par les professionnels de l'édition. La responsabilité élargie du producteur, qui imposerait aux éditeurs l'apposition d'une signalétique de tri sur les livres, mais aussi le règlement d'une écocontribution au financement et au développement de la filière du recyclage.
Cette dernière « avoisinerait sans doute environ 10-15 millions d’euros par an selon les modalités en vigueur (soit 0 à 3 centimes par livre [“0 centime pour les très petits éditeurs, [...] environ 2 centimes par livre écoconçu, et jusqu’à 3 centimes pour les autres”, précise l'ONG]) », selon le WWF. Pour ce dernier, l'État doit intervenir.
Le récent projet de loi relatif à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire, présenté en juillet dernier, a pourtant montré que les pouvoirs publics excluaient toujours les producteurs de livres du champ de la responsabilité élargie du producteur.
Pour les bibliothèques et les lecteurs, le rapport recommande avant tout la poursuite et l'approfondissement de pratiques déjà observées, comme la généralisation des dons, des ventes à bas prix pour le désherbage des bibliothèques ou encore un meilleur recyclage en cas de mise au rebut du livre.
L'intégralité du rapport, signé par Julien Tavernier, Lisa King, Juliette Kacprzak et Daniel Vallauri, est disponible ci-dessous.
4 Commentaires
Catherine Secq
27/10/2019 à 06:57
Bonjour, cet article n'aborde pas la solution de l'impression à la demande qui est une vraie réponse au gaspillage constaté dans la filière de l'édition. Malheureusement, en France, imprimer ses livres à la demande implique des achats fermes et donc les libraires ne jouent pas le jeu, préférant continuer à pratiquer le dépôt-vente et donc le retour d'un livre sur quatre invendu. Beaucoup de chemin reste à faire !
TARA
28/10/2019 à 09:49
...Et pendant ce temps-là, des milliers d'enfants n'ont pas accès à la lecture ! Nous marchons sur la tête !!! Mais ce sont nos enfants qu paieront la facture...
Pendant un temps il y a eu des boutiques où l'on pouvait acheter à bas-prix es invendus ou des livres ayant dépasser leur âge de vente (parfois moins d'un an !), malheureusement, elles ont fini par fermer. Je suppose par manque de rentabilité ?
Et pourtant, c'était un bon compromis.
Laurent Goater
29/10/2019 à 23:21
74 % la fibre de cellulose est déjà recyclée en Europe, alors même que chaque fibre ne peut l’être que 3 à 5 fois. Cette filière est donc très bien gérée. Les éditeurs ont besoin que les lecteurs lisent plus de pages chaque jour ce qui exige un bon confort visuel. Il faut donc reblanchir le papier recyclé pour ces livres, avec plus de produits chimiques et de déchets que pour faire du papier FSC neuf. C’est absurde. Il faut utiliser cette fibre pour les emballages.
Marseille
12/11/2019 à 11:07
A Marseille les colonnes de tri pour le papier ont été retirées de la zone publique! Que faire des très vieux dictionnaires, et autres livres techniques devenus obsolètes?