L'année 2015 marquait le retour du Comic Con parisien, après une année d'interruption, une séparation de la Japan Expo et une reprise en main par Reed Exposition. Ce reboot de l'événement qui a réuni avec 30.000 visiteurs en 3 jours s'est passablement fait étriller sur les résaux. De nombreux progrès doivent être faits pour la deuxième édition, en octobre 2016. Pierre-Yves Binctin, directeur de l'événement, est revenu avec nous sur l'organisation du Comic Con Paris.
Le 01/03/2016 à 16:05 par Antoine Oury
Publié le :
01/03/2016 à 16:05
(ActuaLitté, CC BY SA 2.0)
ActuaLitté : Comment vous et votre équipe avez-vous vécu cette première édition ?
Pierre-Yves Binctin : Comme un tsunami, mais c'est positif. Personne dans l'équipe ne venait du milieu des festivals, c'était donc assez intense. 30.000 personnes, c'est évidemment bien plus que ce que nous attendions. Il s'agissait de l'année 1 pour ce reboot, nous avions plein de choses à prouver aux talents qui étaient là, aux gens qui venaient de New York, aux partenaires, aux exposants et bien sûr aux visiteurs.
Je considère qu'un exposant qui revient en année 2 a été satisfait de l'année 1. Quand les talents nous proposent de convaincre leurs potes de venir en année 2, c'est également plutôt positif. La couverture médiatique a été énorme, attirée par les nombreux talents présents : dans 3 espaces différents, nous avions plus de 40 heures de contenus sur 2 jours et demi, 35 artistes dans l'artist alley, des auteurs et des stars américaines, Frank Miller, Brian Azzarello, Jimmy Palmiotti, Billy Tucci, Amanda Connor, les auteurs de Glénat, de Delcourt, il y en avait une pléthore.
Au niveau des visiteurs, nous avons bien conscience que nous avons énormément de choses à améliorer en année 2, sans avoir besoin des commentaires Facebook pour le savoir. Notre objectif, pour cette prochaine édition, est de faire en sorte que les visiteurs soient contents des contenus et des exposants, de nouveau, mais aussi qu'il y ait plus de choses à faire sur le Festival, avec des animations. C'est un gros challenge pour nous, parce que, autant l'année 1 constitue une mise en place, en revanche l'année 2 ne laisse pas d'excuses.
Quelles seront les activités et animations proposées ?
Pierre-Yves Binctin : Je ne vais pas vous spoiler, parce que nous sommes encore en train de les organiser, mais notre objectif, c'est d'arriver à cette ambiance des parcs d'attractions : on arrive le matin et on repart le soir. C'était déjà un peu le cas l'année dernière : si l'on se construisait un programme de conférences, de master class et de workshops, on pouvait y passer la journée. Ce qui a manqué selon les visiteurs, c'était les activités sur place, les photos à prendre avec des voitures ou des accessoires, la visite d'une exposition... C'est ce que nous allons mettre en place cette année.
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Posté par Comic Con Paris sur mercredi 24 février 2016
Le principal reproche portait sur le manque d'espace au sein de la Grande halle de la Villette, comment allez-vous y remédier ?
Pierre-Yves Binctin : Nous n'avions pas loué toute la Grande Halle de la Villette : cette année, 100 % de l'espace sera disponible, ce qui ajoute donc tout l'espace inférieur, les mezzanines, l'extérieur... Nous aurons plus de place, pour plus d'exposants, plus de partenaires et plus d'animations.
Pour le moment, donc, pas de déménagement vers un lieu plus grand ?
Pierre-Yves Binctin : Nous restons très humbles : je préfère me dire que les fans se retrouvent entre eux, vivent une expérience super, plutôt que de louer 6 halls à la Porte de Versailles pour les retrouver à moitié vides. On avait conscience que c'était très dense à la Villette, mais dans les allées ou à l'extérieur, on sentait l'émulation entre fans et cosplayers, ce qui est important pour ce type d'événements.
Certains visiteurs évoquaient également la présence moindre des fabricants de jouets...
Pierre-Yves Binctin : Nous nous sommes posé la question : « Que pensent, que veulent les Français qui ne sont pas allés aux États-Unis, dans les conventions ? » Ensuite, il faut se confronter à la réalité : aux États-Unis, il y a 50 % de boutiques dans les Comic Con. Sur Comic-Con Paris, il y avait 52 % de boutiques sur les exposants, nous avons donc respecté l'habitude prise chez Reed. Mais lorsqu'il y a 50 % de boutiques à la New York Comic Con sur 80.000 m2, cela se voit moins que sur un événement de 10.000 m2... Pour répondre à votre question, nous avons démarché les fabricants de jouets, mais il fallait nous faire confiance, se baser sur notre seule bonne foi pour cette première édition. Pour cette deuxième édition, on nous prête une oreille plus attentive, forcément. Nous ne forçons personne, cela dit : si les fabricants ont envie de venir, nous les accueillerons, sinon c'est dommage pour eux.
Au niveau des boutiques, il y a de tout, de la toute la France, de l'étranger... Personnellement, j'habite à Boulogne-Billancourt, il y a un libraire que j'adore, forcément je suis allé le voir, on a discuté, il n'a pas pu finalement, mais ce sont aussi des gens que l'on apprécie et que l'on connaît que nous invitons. Nous sommes les premiers spectateurs de notre événement.
(ActuaLitté, CC BY SA 2.0)
L'absence d'Urban Comics a elle aussi été très remarquée, quelle en est la raison ?
Pierre-Yves Binctin : Je suis arrivé sur le festival le 10 janvier 2015. J'ai rencontré Pôl Scorteccia [directeur d'Ubran Comics, NdR] plusieurs fois, je lui ai annoncé en exclusivité la présence des auteurs qui font Harley Quinn, puis la présence de Frank Miller. Nous nous entendons très bien, certains éditeurs d'Urban Comics étaient présents pour la conférence sur Frank Miller, mais je ne connais pas la raison exacte de l'absence de l'éditeur. Tout peut arriver, des exposants nous ont rejoints 3 jours avant le festival. Nous sommes très flexibles chez Reed, et nous pouvons gérer ce type de situation. Je serai ravi qu'Urban soit là pour l'édition 2, les visiteurs aussi, mais l'événement se passera quand même si Urban est absent. Entre Delcourt, Glénat Comics, Panini, Les Humano, L'Homme sans nom, nous avons la chance d'avoir d'autres acteurs importants, et pour moi il n'y a pas de sujet.
L'accueil d'éditeurs de taille plus réduite est-il possible ?
Pierre-Yves Binctin : Nous voulons créer un festival qui ait du sens : L'Homme sans nom n'est pas le plus gros des éditeurs, et pourtant il était là dès la première année, ses auteurs et dessinateurs étaient ravis, il reviendra cette année... Nous faisons de la place pour tous les éditeurs et exposants qui sont dans notre cœur de cible et qui ont envie de partager leur passion et leur savoir-faire. Bragelonne a failli venir aussi, mais au dernier moment, ils n'ont pas eu l'auteur qu'ils voulaient, ou le livre, mais cela ne signifie pas qu'ils ne seront pas là cette année.
Une expansion vers le manga est-elle envisageable ?
Pierre-Yves Binctin : Nous respectons énormément Japan Expo, nous collaborons avec eux parce qu'ils sont de très bons conseils pour nous, donc je n'ai pas de raison d'aller marcher sur leurs plates-bandes. Ils font le plus gros événement français sur la pop culture et la culture geek, nous avons suffisamment à faire avec la science-fiction, l'héroïc fantasy et les super-héros. Nous sommes déjà partenaires avec eux sur du contenu : ils ont faire venir le réalisateur de The Boy and the Beast, Mamoru Hosoda, et il y avait des avant-premières de son film : nous les avons relayés sur nos réseaux, car c'est une véritable passerelle entre nous.
Avez-vous établi une politique globale pour les dédicaces ?
Pierre-Yves Binctin : Nous n'avons pas encore établi de politique pour les dédicaces : l'année dernière, pour Frank Miller et Brian Azzarello, nous avons été obligés de limiter, mais les gens peuvent ramener leurs albums. Cette année, nous n'y avons pas encore réfléchi, nous travaillons pour le moment au programme.
Envisagez-vous la mise en place d'un système comme le tirage au sort pour assister aux différents événements, en raison de l'affluence ?
Pierre-Yves Binctin : Non, c'est premier arrivé, premier servi. Si l'on veut assister à un panel, il faut arriver 2h avant, au précédent, voire à celui d'avant encore. Et ça, c'est quasiment partout pareil. Nous avons été sold out avant l'ouverture, mais c'est comme pour un concert, les places partent vite, parfois. Quand Frank Miller nous fait l'honneur de sa présence avec des ex-libris dédicacés du prochain Dark Knight, quand les actrices Krysten Ritter et Carrie-Anne Moss de Jessica Jones sont présentes avec le premier épisode en exclu avant même sa diffusion aux États-Unis, l'affluence est là. Forcément, la salle n'a que 800 places, forcément il faut attendre 1h30 pour rentrer, c'est vrai, mais c'est la rançon du succès. Et ceux qui en sont sortis n'étaient pas déçus.
Qu'en est-il de l'accueil des cosplayers, qui comptent beaucoup dans la réussite d'un tel événement ?
Pierre-Yves Binctin : Le cosplay est un élément très important des Comics Con, et nous faisons ce qu'il faut pour que les cosplayers se sentent bien à celle de Paris. Reed Pop organise par ailleurs un concours mondial à l'intérieur de tous les Comic Con : les gagnants de chaque pays se rendent à la finale à Chicago au C2E2, et la gagnante de Paris va représenter la France à Chicago dans 15 jours, invitée par Reed à représenter la France dans cette Coupe du Monde du cosplay. L'année dernière, nous avons eu 120 inscrits environ, 60 ont proposé des costumes, nous en avons retenu une trentaine... Cette année, rebelote, mais nous réfléchissons aussi à des scènes ouvertes, des espaces pour que les cosplayers puissent se prendre en photo...
Cosplay de The Flash au Comic Con Paris (ActuaLitté, CC BY SA 2.0)
Le prix de l'entrée reste-t-il le même pour cette deuxième édition ?
Pierre-Yves Binctin : Le prix de l'entrée augmentera un petit peu, en raison de l'inflation tout d'abord, et puis parce que nous voulons délivrer des talents de qualité : certains sont invités par des studios, d'autres par nous-mêmes. Avec les studios, nous travaillons de manière très claire : faire venir les talents, cela a un vrai coût. Nous préférons que les studios investissent dans leur venue et qu'ils apportent du contenu. S'ils veulent exposer et prendre un espace, évidemment, nous sommes ouverts, mais la participation des studios, c'est surtout les talents et les contenus. Aussi bien pour les studios de cinéma que de série télé, ou les éditeurs : SyFy a fait venir Eric Balfour de Los Angeles [acteur dans The Spirit ou les séries Haven, Super Hero Family, NdR], très clairement cela a un coût.
Comment est financé le Comic-Con ?
Pierre-Yves Binctin : Nous ne recevons pas de fonds publics pour l'événement et le budget alloué par Reed a été revu à la hausse pour la location des nouveaux espaces de la Grande Halle. Cela signifie qu'on y croit, et que malgré les commentaires négatifs parfois orientés, on veut satisfaire les visiteurs. Nous sommes organisateurs, mais nous sommes tous des geeks, des fans, et nous nous mettons à la place des visiteurs, en nous interrogeant sur ce qu'ils ont envie de voir, de faire, les talents qu'ils ont envie de rencontrer. Nous sommes conscients de nos faiblesses, et notre objectif est de satisfaire les fans, encore plus en année 2.
Nous avons vécu des moments incroyables, comme lorsque Frank Miller prend 20 minutes pour dessiner un Daredevil dans sa chambre d'hôtel. Nous ne sommes pas des groupies, mais comme nous-mêmes nous aimons ça, nous essayons de construire un événement à la hauteur du public : aussi bien pour les plus exigeants que pour le grand public, avec Omar Sy, Squeezie ou Cyprien. Quand Louis Leterrier fait sa master class et qu'il est rejoint par Mouloud Achour qui vient lui passer un petit bonjour, ce sont des moments comme ceux-là qui font plaisir aux fans, agréablement surpris.
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