Censure : Des écrivains en exil font éditer illégalement leurs œuvres en Iran
Des membres d’un club de lecture en ligne s’efforcent de faire passer en contrebande des écrits interdits en Iran. Ce petit réseau d’auteurs, de traducteurs et d’éditeurs souhaite s’adresser à leurs compatriotes restés au pays et en particulier à la jeunesse iranienne, qu’ils s’efforcent d’armer intellectuellement.
Dans une série d’articles, le Los Angles Time est revenu sur la diaspora iranienne aux États-Unis. Parmi les hommes et les femmes qui ont fui le régime autoritaire de la République islamique se trouvent des écrivains. Ces exilés plus ou moins volontaires ressentent parfois le désir de faire entendre leur voix au sein de leur pays natal. Un souhait plus complexe qu’il n’y paraît.
« Je crains que si les gens nous envoient leur adresse pour que nous envoyions les livres par la poste, elle soit divulguée aux autorités », explique par exemple l’un des membres au journal. L’Iran réglemente en effet toujours étroitement la publication de livres. Plusieurs sujets sont strictement interdits, tels que le sexe, l’alcool ou encore la critique de l’islam.
Les éditeurs et libraires qui proposent ces ouvrages interdits s’exposent parfois à des peines de prison. Le but du gouvernement religieux est de se protéger de « l’invasion culturelle occidentale » qui menacerait de déstabiliser le pays. Si la pression s’est relâchée ses dernières années, le Los Angeles Time rappelle que des inspections surprises d’imprimerie ou le blocage de site web sont encore des pratiques courantes.
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Faire entendre sa voix dans ce contexte n’est donc pas une sinécure. Pour Shahriar Mandanipour qui a quitté l’Iran pour Cambridge en 2006, cela reste néanmoins une nécessité. Son livre, Moon Brow, a été publié en 2018, mais il s’est efforcé de le faire publier au sein de son pays natal. L’ouvrage aborde le sujet de la guerre Iran-Irak à travers les souffrances d’un héros alcoolique… pas exactement au goût du comité de censure.
Pour le faire publier en Iran il s’est appuyé sur Hadi Khojinian, un autre écrivain devenu éditeur à Londres. Celui-ci gère une équipe de 20 éditeurs clandestins de l’autre côté de la frontière. Grâce au travail de ces contrebandiers un peu particulier, le livre de Mandanipour s’est rapidement vendu à quelque 1 000 exemplaires sur le sol iranien.
Installée à Las Vegas, la romancière de 68 ans Moniro Ravanipour a de son côté souhaité toucher les femmes des zones rurales. Étant elle-même née dans une province du sud-ouest de l’Iran, ses écrits sont imprégnés de ses expériences vécues sous le joug de République islamique.
Aujourd’hui, elle anime un cours d’écriture en ligne gratuit composé d’une dizaine de femmes iraniennes. Avec cette initiative, elle souhaite doter la prochaine génération des compétences nécessaires pour écrire, et se dit déterminée à les aider à surmonter leur douleur afin qu’elles puissent trouver leur voix.
Crédit photo : Tour Milad — Téhéran — DARA ZARBAF — CC BY-SA 4.0
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