Cette année, la Foire du livre de Bruxelles qui s’est tenue du 5 au 8 mars 2020 avait pour fil rouge le « livre ensemble », avec le premier constat que partager ses lectures apprend aussi la tolérance et l’ouverture d’esprit. Échappant de peu au coronavirus, la manifestation sauvait les meubles vis-à-vis des professionnels – également, en soulignant l’importance de faciliter l’accessibilité des titres à l’échelle internationale. Pour ce faire, était organisé un premier marché des droits européens. Retour sur cette initiative vivement saluée par les participants.
Le 27/03/2020 à 09:55 par Camille Cado
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27/03/2020 à 09:55
Etaient également présents la Commission européenne avec son programme « Europe Créative », l’association Traduqtiv — qui réunit les traducteurs de Belgique —, le PILEn (Partenariat Interprofessionnel du Livre et de l’Édition numérique) et la Fédération Wallonie-Bruxelles. Ces institutions avaient pour mission de fournir les informations nécessaires aux acteurs du livre présents afin de les accompagner au mieux dans la traduction, l’édition ou encore la promotion d’un ouvrage.
Derrière cette initiative, l’agence littéraire Astier-Pécher, connue pour avoir déjà organisé Talentueux Indés au Salon du livre Paris en 2015. Cet événement entièrement consacré aux éditeurs indépendants français et francophones proposait un moment d’échange spécifique pour un groupe de 20 éditeurs indépendants afin de favoriser la rencontre des éditeurs étrangers et des acteurs de l’édition indépendante francophone.
L’agence a également mis en place un centre de droits lors du Salon international de l’édition et du livre (SIEL) à Casablanca, au Maroc, où étaient invités 13 éditeurs du monde arabe et africain ainsi que 8 acheteurs de droits étrangers.
« Le Commissaire général de la Foire du livre de Bruxelles, Gregory Laurent, nous a missionnés pour confectionner un programme international et professionnel », nous explique Laure Pécher, contactée par ActuaLitté. « Il voulait que l’on aille plus loin que ce que nous avions déjà organisé, avec le constat qu’aucun pays francophone d’Europe ne disposait de marché de droits généraliste. »
« Avant les désistements on avait dépassé les 150 participants et les 400 rendez-vous sur la journée. » Des chiffres plus que réjouissants qui s’expliquent d’abord par le fait que « les emplacements des tables à la manifestation de Londres coûtent cher. » Contrairement à celles de Bruxelles qui étaient entièrement à la charge de la Foire.
« Mes collègues et moi-même avons rempli nos carnets de rendez-vous ! » se réjouit Milena Ascione de l’agence Book Agent avant de saluer une organisation des plus efficaces pour une première édition. « C’était super de se servir de Nakiri, cette plateforme de prise de rendez-vous déjà utilisée à Turin. Tout est plus facile et rapide. Sans cela, remplir son agenda est quelque chose de très chronophage ! »
« Et puis c’était très pratique » ajoute Hadi Barkat, créateur de la maison d’édition suisse Helvetiq. « Grâce à cette plateforme, on a eu accès en amont aux profils des participants qui étaient présents. On a donc pu convenir des rendez-vous avec des confrères ou des consœurs dont la branche nous intéressait vraiment. On ne perdait pas de temps à contacter ceux qui n’étaient pas dans notre domaine. »
« Ce que j’ai vraiment apprécié, c’est le profil des participants qui était vraiment très diversifié », nous confie-t-il. « Lorsqu’on va à Londres ou à Francfort, il y a certains types de maisons que l’on n’arrive pas à voir, soit parce que ce sont des petites maisons indépendantes peu connues, soit parce qu’elles appartiennent à un pays où le marché du livre n’est pas très important ».
Dès lors, si lors de la London Book Fair, les grands groupes éditoriaux d’importants marchés du livre comme l’Allemagne, l’Italie, les États-Unis ou l’Angleterre noient un peu la visibilité des autres, l’agent nous explique avec enthousiasme avoir pu rencontrer des Croates, ou encore des Polonais.
Une aubaine pour cet agent spécialisé dans deux types de marchés d’activité : la vente des droits français des ouvrages étrangers (notamment lusophones, italiens, anglais, espagnols) ainsi que la gestion des droits mondiaux des maisons francophones. « L’important pour nous c’était de rencontrer des maisons étrangères pour notre deuxième secteur d’activité. Et cela n’a pas raté. On a eu des rendez-vous toute la journée, on a échangé avec des maisons d’édition que l’on n’avait jamais vues, des nouveaux éditeurs aussi. »
« C’est vraiment intéressant de participer à d’autres marchés des droits que ceux déjà bien établis, comme Paris » tient à relever à son tour Milena Ascione. « Je représente des maisons d’édition françaises, québécoises et anglaises, c’est important pour moi d’élargir ma liste de représentation. Mais dans des grands marchés des droits, il est rare que les éditeurs belges ou suisses se démarquent par exemple. Ici, nous avons pu les rencontrer. »
Si certains participants ont salué le fait de pouvoir approcher des éditeurs étrangers que l’on voit peu dans d’autres salons, Hadi Barkat, des éditions suisses Helvetiq, a apprécié prendre davantage le temps d’échanger avec des contacts français.
« Comme nous sommes une maison francophone, on profite souvent de ces rassemblements littéraires pour aller à la rencontre des étrangers. On n’a pas forcément le temps d’aller vers les éditeurs français alors qu’on peut assez facilement les contacter toute l’année » justifie-t-il.
Pourtant, « ces rendez-vous sont essentiels pour notre métier » reprend Julián Nossa. « Ce que permettent ces marchés des droits, c’est la rencontre des éditeurs. On parle de leurs gouts, on s’informe des nouvelles collections qui sont en train de développer, c’est très important ! Vendre est un savoir-faire, il faut une connaissance du marché international pour réussir à placer nos livres. »
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Si les marchés des droits revêtent donc encore une importance aujourd’hui à travers l’organisation de rendez-vous be to be entre vendeurs et acheteurs de droits, celui qui a eu lieu à Bruxelles permet de répondre à un vrai besoin de la part des acteurs de livre dans les pays de langue française. « Il y a un vrai vide dans les marchés francophones des droits du livre », et ce, malgré les initiatives du Salon du livre Paris et la Foire des droits de traduction du Salon du livre de Montréal, affirme Julián Nossa.
Et cela s’explique notamment parce que contrairement aux grands marchés des droits déjà existants, celui qui a eu lieu au Salon du livre de Bruxelles « n’a pas de limite ». « Les fellowship de Paris disposent par exemple d’un nombre de participants clos et les agents littéraires étrangers ne sont pas acceptés » précise l’agent littéraire.
Pour le co-créateur de l’agence BAM, ce nouveau marché des droits du livre s’inscrit plus largement dans une tendance qui voit fleurir des initiatives alternatives aux grands marchés des droits déjà établis, notamment Londres et Francfort. « J’ai l’impression qu’il y a vraiment un besoin de trouver des alternatives à ces énormes rassemblements où on peut vite se sentir noyé ».
Ce marché professionnel des droits européens a également eu de bonnes conséquences sur le salon. « C’est ingénieux d’adjoindre un marché professionnel à un salon grand public », note à son tour Hadi Barkat. « Cela rend Bruxelles plus attrayant encore ! La manifestation première est plus complète et plus intéressante. »
Avec une première édition placée sous le signe de la réussite, nul doute qu’elle saura séduire encore plus de participants l’année prochaine, avec une situation sanitaire normale. D’ailleurs, les participants contactés par ActuaLitté se mettent au diapason pour suggérer une seconde journée du marché des droits lors de la Foire du livre de Bruxelles l’année prochaine.
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