Des éditeurs norvégiens offrent une récompense de 500 000 Couronnes (environ 60 000 euros) à qui donnera de nouvelles informations sur la tentative de meurtre de William Nygaard survenue en 1993.
Le 28/11/2010 à 08:31 par Clément Solym
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28/11/2010 à 08:31
William Nygaard, PDG des éditions Aschehoug, avait publié en 1988 les versets sataniques de Salman Rushdie, qui avaient déclenché une vive réaction de la communauté musulmane. La raison ? L’auteur avait décrit Mahomet (caché derrière le nom de « Mahound » dans le livre) comme un prophète mélangeant des « vers sataniques avec le divin ».
Dans les semaines qui suivent sa publication, le livre est banni de nombreux pays comme l’Inde, l’Afrique du Sud ou encore l’Égypte. Il est l’objet d’autodafés.
L’ayatollah Rouhollah Khomeini dénonce le livre comme « blasphématoire » envers l’Islam et émet une fatwa qui appelle à l’exécution de Salman Rushdie, et également de tous ceux connaissant le contenu du livre. Une récompense est même offerte pour la mort de Rushdie.
Cet appel provoque des attentats dans le monde entier, entre autres, Rushdie est forcé de se cacher, le traducteur japonais du livre, Hitoshi Igarashi, est tué, et en 1993, quatre ans après l’émission de la fatwa, on tente d’assassiner l’éditeur William Nygaard. Aucune des affaires n’a été résolue.
Les Kripos, unité norvégienne d’investigation de la criminalité, ont rouvert l’affaire suite à la sortie du livre intitulé Qui a tiré sur William Nygaard ? Par le journaliste investigateur Odd Isungset. Dans son livre, Isungset expose les détails de l’affaire, ses suspects et dénonce la façon dont a enquêté la police d’Oslo.
Isungset dit n’avoir aucun doute sur le fait que la fatwa ait motivé l’attaque, étant donné que Nygaard soutenait publiquement Rushdie. De plus, Isungset pense que certaines pistes méritent d’être poursuivies : « L’un des suspects de l’affaire a acheté le jour suivant l’attaque un aller pour l’Iran en cash, et possédait les mêmes types d’arme et de munitions que ceux utilisés lors de la fusillade ».
La récompense est offerte conjointement par Aschehoug et l’association des éditeurs norvégiens. Le directeur de cette association, Per Christian Opsahl, a décidé de s’investir dans l’affaire, dénonçant l’attaque de Nygaard comme « une atteinte à la démocratie » et comme « une plaie ouverte qui ne guérira qu’une fois l’affaire résolue ».
L’association des éditeurs a demandé au procureur public d’« estimer quelles seront les conséquences » pour la police d’Oslo, concernant spécialement le cas « du suspect relâché sans avoir été interrogé » en 1998.
Isungset est plutôt optimiste quant au dénouement de l’affaire. Il pense que « la police norvégienne est plus proche de résoudre l’affaire que celle du Japon » et que « même si tout cela s’est passé il y a 17 ans, certaines personnes ont pu garder un secret durant toutes ses années et sont peut-être en mesure de le délivrer maintenant. Et si ces personnes reçoivent de l’argent de la récompense, ça les aidera sûrement à parler ».
Nygaard a confié au journal norvégien Aftenposten qu’il était pour lui important de trouver le criminel « essentiellement pour défendre les valeurs norvégiennes de liberté d’expression et le droit de vivre à l’abri de la violence dans une société pluraliste ».
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Par Clément Solym
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