Jolie perle débusquée que la presse française n'a pas manqué de remarquer, et plus particulièrement Slate.fr. Les deux présidentialisants du moment, l'un déclaré, l'autre qui n'a pas encore fait son coming-out se tire la bourre, certes, mais à quelque cinq années d'intervalle... D'autant plus que François Hollande et Nicolas Sarkozy partageraient un goût littéraire commun pour... Camus !
Le 23/01/2012 à 16:01 par Clément Solym
Publié le :
23/01/2012 à 16:01
Eh oui, les classiques sont éternels, mais finalement, entre le 14 janvier 2007 et les déclarations de Nicolas Sarkozy, et le discours au Bourget de François Hollande, le monde a pourtant tourné. Non ?
C'est que, durant sa campagne, le candidat Sarkozy, à qui l'on avait déjà plus envie de claquer le beignet que deux bises, avait dévoilé ce que pouvait être « Sa France ». Mais surtout, il concluait son discours avec la tirade suivante :
Face au drame algérien, Camus avait dit : « Les grandes tragédies de l'histoire fascinent souvent les hommes par leurs visages horribles. Ils restent alors immobiles devant elles sans pouvoir se décider à rien qu'à attendre. »
Attendre quoi ? Sinon le pire ?
Il avait ajouté : « La force du coeur, l'intelligence, le courage suffisent pourtant pour faire échec au destin ».
Pourquoi la gauche n'entend-elle plus la voix de Camus ?
Qui ne voit qu'une fois encore avec du coeur, de l'intelligence et du courage la clé de notre unité et de notre avenir est dans la République et dans la démocratie ? (source... même si c'est dur)
Tout cela, c'était évidemment avant le drame, celui qui a vu tout un pays se faire *hem* pour avoir cru à des lendemains qui chantent pour une France qui se lève tôt. Le seul truc qui chante, à 6 h du matin, c'est le bruit des transports en commun, ou la pointeuse de l'usine.
Or, donc, le candidat officiel Hollande, face à celui qui actuellement pioche dans les deniers publics pour assurer sa petite tournée promotionnelle, s'est fendu d'un discours au Bourget, au demeurant assez inattendu. Mais surtout, à cinq années d'intervalle depuis le discours de la Porte de Versailles, François Hollande s'empare de la même figure littéraire :
L'égalité, c'est ce qui a permis à un enfant orphelin de père élevé par une mère pauvre, sourde et illettrée, de devenir prix Nobel de littérature. Il s'appelait Albert Camus et, après avoir reçu son prix, il écrivit en ces termes à son vieil instituteur : « ma première pensée, après ma mère, a été pour vous. Sans vous, sans cette main affectueuse que vous avez tendue au petit enfant pauvre que j'étais, sans votre enseignement, sans votre exemple, rien de tout cela ne me serait arrivé. » C'est pour l'égalité que nous devons agir parce que, depuis 10 ans, l'égalité recule partout. (source)
« Égalité », un terme qui aura été au coeur du discours de l'aspirant président, entrecoupé d'autres allusions à Shakespeare, notamment, qui lui aura permis de tacler lourdement les vils marchés, qui font la pluie et le beau temps...
Et je me permettrai de citer Shakespeare, qui rappelait cette loi pourtant universelle : « ils ont échoué parce qu'ils n'ont pas commencé par le rêve ». Eh bien nous réussirons parce que nous commencerons par évoquer le rêve ! Le rêve français, c'est la confiance dans la démocratie, la démocratie qui sera plus forte que les marchés, plus forte que l'argent, plus forte que les croyances, plus forte que les religions ! Le rêve français, c'est l'achèvement de la promesse républicaine autour de l'école, de la laïcité, de la dignité humaine, de l'intérêt général.
Discours éminemment littéraire, donc.
Mais un peu politique aussi, évidemment.
Mais tant que Hollande n'envisage pas de faire entrer de force Camus au Panthéon...
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