Avec la crise sanitaire liée au coronavirus et le confinement, les bibliothèques ont dû faire preuve d’imagination pour s’adapter aux restrictions gouvernementales. Pour assurer la sécurité de tous et endiguer la propagation du virus, des initiatives ont vu le jour comme la mise à disposition d’un service de commande et de retrait et un élargissement de l’offre en ressources numériques. De nouveaux services qui semblent être amenés à perdurer.
Dans un premier temps, elles ont évidemment été contraintes de limiter l’usage de leurs espaces publics. Et de mettre à disposition des services adaptés aux mesures et recommandations nationales destinées à enrayer la propagation de la COVID-19.
Comme de nombreuses villes, les bibliothèques grenobloises ont d’abord rouvert leur service de prêt de documents. Le principe était simple : pour réserver des documents, l’usager pouvait procéder directement via le catalogue de la bibliothèque grâce à son compte abonné, par courriel ou téléphone auprès de l’établissement, ou sur place, pour ceux qui n’étaient pas encore inscrits ou simplement pas en mesure de réserver autrement.
Lorsque les documents réservés étaient disponibles, il était possible de venir les récupérer dans une bibliothèque de leur choix, en respectant les distances et les gestes barrières. Ils pouvaient également les recevoir directement chez eux. Les documents pouvaient ensuite être retournés dans n’importe quelle bibliothèque.
D’autres établissements ont opté pour une organisation inédite. Comme la Bibliothèque de Grenoble Ecole de Management qui a misé sur une bibliothèque 100 % en ligne et un personnel 100 % disponible. Ainsi, de nouvelles modalités d’accès aux ressources ont vu le jour et les services ont été totalement réinventés.
Par exemple, une assistance en ligne était assurée par des professionnels de l’information afin de maintenir la médiation avec les publics. Le courriel a été confié à plein temps à un documentaliste afin qu’aucun besoin ne soit délaissé. Pour répondre au besoin immédiat, un nouveau service de tchat a été mis en place et confié là aussi à un documentaliste disponible instantanément.
Une nouvelle FAQ a été publiée en ligne avec des informations à jour. Toutes les séances de formation prévues en présentiel ont dû être remaniées et adaptées en classes virtuelles et interactives. Enfin, de nouvelles vidéos tutoriels ont été créées et publiées sur le site de la bibliothèque pour renforcer l’aide et le support aux utilisateurs.
L’établissement a également trouvé le moyen de garantir à ses publics l’accès à ses ressources à travers l’augmentation des collections de livres électroniques, l’extension des bouquets des bases de données (Scholarvox, Cairn, Jstor), l’augmentation du nombre de connexions simultanées (ENI) ainsi que l’adaptation du règlement lié aux prêts et annulation des pénalités.
L’établissement a également dû faire preuve d’imagination pour motiver les équipes. « La crise sanitaire du Covid19 a obligé, de façon soudaine et contrainte, les directeurs et responsables de bibliothèques, à organiser le télétravail de leurs équipes. À ce titre, l’équipe des dix documentalistes de la Bibliothèque de Grenoble Ecole de Management, dont j’ai la responsabilité, a été concernée » explique Corinne Flacher-David, Directrice de la bibliothèque Dieter Schmidt à GEM.
« Outre le défi de conserver la convivialité du travail en équipe et la motivation des collaborateurs, nous avons dû faire face à la mise en liquidation judiciaire de l’un de nos fournisseurs de livres électroniques, ainsi qu’à la question du retour des livres empruntés par nos étudiants en fin de cursus, sans savoir quand nous pourrions réouvrir. La question était la suivante : comment manager une bibliothèque et son équipe dans un contexte incertain et qui peut aboutir à une perte de sens ? »
COVID : les livres placés en quarantaine
Pour ce faire, l’établissement a souhaité réintroduire de la convivialité à distance en réinstaurant une « météo du jour » qui permettait d’échanger chaque lundi matin, en visio-conférence, sur l’humeur de chacun des membres de l’équipe.
Le second défi a été de communiquer sur les projets et de gérer l’activité de l’équipe, sans les surcharger, ni de façon écrite, avec les différents outils et canaux qu’ils avaient à leur disposition ni de façon orale avec des visioconférences qui auraient pu être « excessives ».
« Pour manager à distance, il me semble nécessaire d’aller encore plus loin dans le lâcher-prise, et de faire confiance à ses collaborateurs, tout en rappelant le cap sur les projets et les échéances à venir » a ainsi tenu à souligner Corinne Flacher-David.
En parallèle, les équipes du Playground de Grenoble Ecole de Management, ont inventé un « serious game » pour aider les bibliothécaires à trouver de nouvelles idées pour réinventer leur service, à l’aune des nouvelles contraintes sanitaires. Le but : former les bibliothécaires à trouver les moyens d’inciter les usagers à (re)venir dans les lieux.
Le jeu se déroule en deux temps. D’abord, les joueurs représentent 4 bibliothèques qui s’affrontent pour organiser la fête du solstice d’été. Charge à eux de convaincre les personnages tirés au sort parmi 40 villageois représentatifs de la population française : hommes, femmes, enfants de tous les âges, personnes valides ou en situation de handicap, qui ont l’habitude de fréquenter les bibliothèques ou non.
Pour remporter la manche, il faut convaincre le plus de personnages possibles selon leur histoire, péchés mignons, sujets d’agacements et potentielles motivations à aller à la bibliothèque. Ensuite, les joueurs doivent coopérer pour imaginer le programme de la fête. Les bibliothécaires apprennent ainsi à identifier et mobiliser les ressources disponibles à la médiathèque départementale pour créer et monter une activité ou un projet en fonction d’un public et d’un contexte donné.
« Le jeu a été imaginé avant la pandémie. Il est le fruit de 2 ans de travail en collaboration avec la Médiathèque Départementale de l’Isère (MDI). Avant le confinement, nous venions juste de former les membres de la MDI. Ces derniers formeront à leur tour les bibliothécaires du réseau départemental isérois » précise Isabelle Patroix, chargée du développement, de la valorisation et du rayonnement du service serious games de GEM.
« On peut tout à fait imaginer faire jouer ce jeu pour trouver des solutions d’accueil et des évènements qui s’adapteront aux nouvelles contraintes des bibliothèques » conclut-elle.
BIBLIOTHEQUES :les défis du déconfinement
Pour cet été, le réseau de bibliothèque de Grenoble mise sur des activités en extérieur. Un programme d’animations culturelles a d’ailleurs été proposé : « Des rendez-vous dans les parcs, les jardins, les espaces publics de la ville avec votre bibliothèque. Dans chaque quartier, elle organise des temps de lecture, de conte, de spectacle et de rencontre, pour des instants privilégiés de détente en famille » peut-on lire sur le site internet de la bibliothèque municipale.
L’établissement a récemment annoncé que tous les services du réseau de bibliothèque étaient presque entièrement rétablis. Il est désormais possible d’accéder aux espaces pour choisir et emprunter des documents, les consulter sur place, ou encore accéder aux postes informatiques. Le tout, dans le respect des règles sanitaires, évidemment.
En parallèle, la numothèque et les ressources numériques de la bibliothèque continuent d’être accessibles en ligne. Il est également toujours possible d’utiliser leur service de prêt à distance.
Photographie d’illustration : Bibliothèque municipale de Lyon (Part Dieu), ActuaLitté CC BY SA 2.0
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