Chaque semaine k-libre et ActuaLitté vous proposent par le biais d'une sombre collaboration une revue de presse croisée, qui filtre l'actualité des littératures policières et du monde qui les entoure. Vous aurez d'un côté des chroniques littéraires d'ouvrages très récents, et de l'autre des informations concernant cet étrange monde. Comment il vit, de quoi il est fait, et comment parfois il meurt. Le tout formant une ActuaLitté policière bien k-librée !
Le 04/03/2013 à 08:27 par k-libre Julien Vedrenne
Publié le :
04/03/2013 à 08:27
Roman : Les Instruments de la nuit, de Thomas H. Cook
Il existe un lieu commun de la littérature policière lorsqu'une enquête a échoué ou que la vérité n'est pas apparue dans toute sa nudité, quelqu'un demande, des années après, à ce qu'une personne extérieure la reprenne sur de nouvelles bases. Thomas H. Cook, dans son roman Les Instruments de la nuit, relate la découverte dans un riche domaine, il y a une cinquantaine d'années, du corps d'une jeune fille retrouvée morte. Le suspect principal est décédé d'une crise cardiaque quelques semaines plus tard laissant évidemment des questions en suspens. C'est alors que la propriétaire du domaine a demandé à un écrivain de venir découvrir la vérité.
Roman : Du bleu sur les veines, de Tony O'Neill
Du bleu sur les veines s'ouvre sur une description d'Hollywood en août 2000. Le soleil brille jusqu'à la nausée sur une ville artificielle dopée au cinéma et à la came. Entre ces deux pôles, c'est le néant. Un néant fréquenté par les touristes qui bavent sur le glorieux passé des grands studios. En fait, Hollywood est une ville dangereuse pour qui veut se la jouer dans la cour des grands, surtout quand on vient d'un milieu prolo d'Angleterre, qu'on a joué dans un bon groupe classé dixième au Top of the Tops et qu'on se retrouve ensuite sans rien faire, sinon des clips pourris pour des sous-groupes de Heavy Metal et que la fille qu'on aimait devient froide comme un congélateur dès qu'on tente de l'approcher. À partir de ce moment-là, la vie n'est plus du tout un fleuve tranquille, mais une rivière amère pleine de cailloux qui pourraient bien être du crack. Du bleu dans les veines raconte la descente aux enfers de Tony O'Neill dans la drogue. Tout y passe, mais c'est l'héroïne surtout qui le mène en bateau. Au lieu d'écrire ou de composer, Tony passe son temps à écumer les bars et les soirées festives à la recherche des paradis artificiels, en compagnie de potes aussi camés que lui et de filles qui veulent bien tout négocier contre une petite pipe.
Roman : Éclats de voix, de Yves Hughes
Il est parfois bon de revenir aux fondamentaux du genre au milieu des romans noirissimes revenus de tout sans être sortis de chez eux, et des thrillers horrifico-alambiqués. Lorsque l'on parle de roman policier, les racines du genre sont simples : un meurtre, un flic et une enquête. Tout dépend ensuite de ce que l'auteur est capable de faire avec cet ingrédient ! Utilisant son personnage de Yann Gray, curieusement créé pour des romans jeunesse (alors que le personnage de son épouse victime d'une maladie vénérienne est des plus adultes, ou alors votre serviteur n'entrave que pouic au distinguo, comme on dirait chez San-Antonio), il nous offre en effet une enquête en douceur. En douceur, mais sans mièvreries ni longueurs...
A retrouver sur k-libre
Roman : Vostok, de Jean-Hugues Oppel
Quelque part au sud du continent africain, un coin aussi reculé que paumé, où le temps aime prendre son temps, Métal-IK, une compagnie minière, exploite dans l'urgence et dans la fournaise ambiante des métaux rares, de ceux que l'on utilise pour permettre à des hommes et des femmes dans des pays occidentaux de parler dans un téléphone portable. Inutile de dire que cette compagnie joue une drôle de partition sans se soucier des conditions de travail et climatiques qui, elles, sont alarmantes. Tanya Lawrence, envoyée spéciale pour le compte de l'Onu, est chargée de s'assurer du respect du droit du travail dans un environnement macho qui va très vite lui être hostile. Heureusement pour elle, la compagnie emploie Tony Donizzi, un homme, véritable tueur, à la double identité venu se perdre et oublier une partie de son passé, qui va se révéler un allié puissant et un amant... puissant... On a là le point de départ d'un thriller écologique rythmé par autant de phrases sèches comme un tir d'AK-47 asséné par un Jean-Hugues Oppel qui reprend pour l'occasion la trame remaniée d'un vieux roman d'anticipation.
Roman : Le Cimetière des hirondelles, de Mallock
Le Cimetière des hirondelles est le troisième roman d'un auteur qui, selon une vieille tradition (d'Ellery Queen à David Morgon) a pris pour pseudo le nom de son personnage... Amédée Mallockn donc, mélange de misanthropie et d'humanisme, vieux chien encore capable de mordre et frère de cœur du Mendez de Francisco González Ledesma. L'histoire est assez intrigante : un beau jour, Manuel Gemoni a vu dans un documentaire sur Saint-Domingue le visage d'un vieil homme dans la foule. Quelle impulsion a pu le pousser à se rendre à l'autre bout du monde pour tuer "l'abject vieillard"... alors qu'il ne le connaît pas et ne l'a jamais vu ? Une victime, un nommé Tobias Darbier, à qui Mallock découvre un passé sulfureux initié pendant la Seconde Guerre mondiale avec des antécédents de tortionnaire. Remontant la piste à l'aide d'éléments épars fournis par Manuel lui-même sous hypnose, Mallock dénoue toute une série de correspondances troublantes.
Roman jeunesse : Qui va loin, revient près, de Christophe Léon
Par le biais du récit de la vie de Kimia, adolescente originaire du Congo envoyée en France par son père qui espère lui offrir ainsi un bel avenir, Christophe Léon aborde les sujets très sensibles de l'immigration et de l'esclavage moderne. Avec des mots simples, mais une authenticité troublante, le lecteur découvre, abasourdi, une réalité contemporaine aux allures de tabou. Kimia, qui a grandi entourée de l'amour de son père, se voit contrainte par ce même homme à quitter son pays et sa seule famille pour émigrer en France, où lui est persuadé que la petite fille trouvera une belle vie. Elle sait lire et écrire, et est impatiente, même si effrayée, de découvrir Paris, la ville qui fait rêver son père. Cependant, très rapidement, elle se rend compte que son voyage sera sans retour : prise en main par une "tante" à elle après une traversée en bateau dans des conditions inhumaines, elle comprend que la famille qui "l'adopte" contre des euros sonnants et trébuchants, persuadée "d'acquérir" une orpheline, n'a aucune intention de l'envoyer à l'école.
BD : Le Tueur, 11. La Suite dans les idées, de Matz & Luc Jacamon
La Suite dans les idées est déjà le onzième volet de la série "Le Tueur" scénarisée par Matz et illustrée par Luc Jacamon. D'album en album, le personnage filiforme de Tueur prend de l'ampleur et une certaine épaisseur psychologique, qui en font un réel intérêt pour le lecteur. Ce n'est pas tous les jours qu'un tueur cite Carlos Fuentes et Alexandre Dumas, et lit un roman de Vargas Llosa pour en retirer une philosophie. Bien sûr, au fil de ses aventures, Tueur s'est forgé un background, mais il n'est pas pour autant nécessaire d'avoir lu tous les épisodes précédents pour se plonger dans La Suite dans les idées (même si c'est préférable) et se prendre au jeu d'une intrigue classique qui surprend par les à-côtés aux aspérités marquées et par un trait qui allie bande dessinée d'action et art graphique à l'instar des trois belles premières planches de l'album. L'un des amis de Tueur, et aussi son principal commanditaire, le Colombien Mariano, est devenu ministre et s'est mis en tête d'éliminer les rivaux qui pourraient l'empêcher d'accéder à un plus haut poste. Le tout sans qu'évidemment les soupçons puissent se porter à un moment ou à un autre sur lui. Si Tueur accepte, c'est un peu la mort dans l'âme ou au nom de cette bonne vieille amitié, parce que les signaux qu'il reçoit sont tous plus ou moins au rouge.
Essai : Sur les traces de la police scientifique, de Patrick Rouger
Un homme est retrouvé par un garde forestier mort dans la neige. L'assassin a pu s'enfuir mais a laissé des traces de son acte et, surtout, a été entraperçu. Tel est le point de départ d'un fait d'enquête que Papitou, officier de police, spécialiste de la police technique et scientifique, raconte à Néphélie, Lilian, Noé et Clarisse après que les cinq promeneurs dans la forêt de Lente aient observé des traces de pattes de lapin dans la neige. Une drôle d'histoire pour des enfants âgés de neuf à dix ans, mais les quatre amis sont avides de curiosité et un peu enquêteurs en herbe.
Derrière Papitou, se cache Patrick Rouger ancien chef de la Division de police technique du Service régional de police judiciaire de Toulouse. Autrement dit un expert à la française, héritier spirituel de Bertillon et de Locard, ses prédécesseurs novateurs en matière de police scientifique.
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