Au cœur de la rentrée littéraire, décerner un prix pour un polar ne manque ni d’ambition ni de saveur. Surtout quand le chef Guy Savoy héberge dans son restaurant les jurés. Pour l’édition 2020 du Grand Prix des Enquêteurs, une nouvelle lauréate est appelée à régner. Katerina Autet l’emporte avec La chute de la maison Whyte.
La première édition, en 2019, a salué Pour seul refuge de Vincent Ortis. Depuis, près de 20.000 exemplaires ont été vendus, savoureux pour une grande première. Cette coédition, qui réunit les éditions Robert Laffont et le Figaro magazine, inclut également l’Agence universitaire de la francophonie. Et le jury réunit tout ce qui se fait de mieux dans le système juridique.
Et pour le clin d’œil, notons la présence de Didier Decoin, le président du prix Goncourt, dont le goût pour le polar, depuis le choix de Leila Slimani en 2016, ne fait plus aucun doute.
Avec dans l’idée de donner ses lettres de noblesse au genre, et probablement un peu de ruer dans les brancards, le Grand Prix des Enquêteurs frappe de nouveau, avec une lauréate d’origine russe. Qui démontre que le polar peut être littéraire ET grand public.
Née à Moscou, Katerina Autet a appris le français durant ses études universitaires en France, à l’âge de 19 ans. Titulaire d’une maîtrise de linguistique, et d’un DEA obtenu à la Sorbonne, elle a changé d’orientation pour se diriger vers une école de commerce.
« Le polar, c’est un genre que j’affectionne particulièrement, que j’aime lire : on y retrouve souvent toutes les problématiques sociétales, et des personnages significatifs », indique la lauréate à ActuaLitté. « Entre le thriller à l’américaine, les choses plus cérébrales, c’est assez naturel de glisser vers ce genre, quand on aime explorer le monde. »
La chute de la maison Whyte, son roman, relève « d’une écriture conjoncturelle », plaisante-t-elle. « J’ai passé une partie de mon adolescence aux États-Unis, et voilà quelques années, j’étais partie en vacances dans la région de Cap Cod (péninsule du Massachusetts). Avec une amie avocate en droit des arts, nous avons beaucoup discuté, et de toutes ses histoires, je me suis dit qu’il y avait matière à bâtir un ouvrage original. »
Dans l’avion du retour, quelques notes sont jetées sur son téléphone, les premières lignes posées avec les idées. Et cette obsession, que d’associer les lieux aux souvenirs — les appartements visités, quelques amis qui se retrouveront, des dîners dans des restaurants.
« Après quatre mois d’écriture, l’histoire est venue rapidement. Et s’est achevée tout aussi vite. Le manuscrit est resté de côté durant plusieurs mois, jusqu’à ce que ma belle-mère me parle de l’appel à manuscrits organisé », reprend Katerina Autet. « J’ai postulé tardivement, fin janvier, et… la surprise fut énorme. »
L’histoire est celle de secrets de famille, qui finissent par devenir plus meurtriers que de véritables armes. La famille Whyte est liée à un événement ancien, devenu tabou : des non-dits avec lesquels les enfants ont grandi. Une relation qui a fini par fausser les échanges avec un père incarnant une figure patriarcale autoritaire.
Pour les trois enfants, la vie bascule quand l’une des sœurs publie un livre explosif qui dévoile cette sombre vérité. Un clivage s’instaure dans la famille, qui se déchire… jusqu’à la mort du père. Le fils est accusé. Les tensions s’aggravent… « Ce sont 20 années de souvenirs mises sous le tapis : et chacun n’a pas les mêmes ni la même relation », sourit la romancière.
De ce passage entre les mains d’un juré de professionnels du crime, elle retient surtout « les retours concrets qu’ils ont faits, une lecture attentive, vigilante aux détails. Ils m’ont conforté dans l’idée que mon texte tenait la route, tout en me demandant d’apporter plus de descriptions pour mieux se figurer les personnes et les lieux. Ils voulaient plus d’ambiance ! »
Le roman sera disponible dès le 17 septembre.
crédit photo : Katerina Autet © Astrid di Crollalanza
Dossier – Les romans de la rentrée littéraire : 2020, l'année inédite
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Paru le 17/09/2020
312 pages
Robert Laffont
17,00 €
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